Déconfinement : les opérateurs déchantent

Manifestement, les annonces du Premier Ministre hier sur le plan de déconfinement - encore virtuel - à compter du 11 mai ont douché les opérateurs de transport public. Alors que depuis plusieurs semaines, la RATP, la SNCF, mais aussi Transdev et Keolis, bref les acteurs majeurs en France du secteur, avaient exposé leur point de vue et les mesures déjà mises en oeuvre mais aussi leurs interrogations sur la suite, on ressent plus qu'une perplexité. M. Philippe a ainsi pris leur contre-pied en imposant la combinaison du port du masque et de la distanciation des individus, tout en maintenant la bride serrée sur la liberté de déplacement... et en demandant aux opérateurs d'augmenter l'offre.

Les opérateurs considèrent qu'il sera très difficile d'appliquer cette règle : la forme est polie du côté des directions, elle est beaucoup plus franche du côté des organisations syndicales qui soulignent aussi le flou sur l'organisation concrète de la protection du personnel et du public au fur et à mesure du déconfinement. Déconfiner en augmentant la contrainte par rapport au confinement, c'est un peu la clarté dans la confusion. Comment faire respecter une règle qui reviendrait à limiter à 20 ou 25 personnes la capacité maximale d'une voiture de métro à Paris, Lyon et Marseille, et probablement moins dans les VAL de Lille, Toulouse et Rennes du fait de leur exiguïté ? Un filtrage en amont suppose du personnel donc des coûts, alors que les recettes sont en chute libre et que la trésorerie des entreprises est au plus mal. Et surtout, cela ne fait que reporter le problème en amont : sur les quais, dans les couloirs et aux arrêts, car la mesure devra aussi être appliquée aux tramways et aux autobus dans toutes les villes de France.

La mesure est d'autant plus surprenante qu'elle a vocation à s'appliquer partout de la même façon, que ce soit dans des Régions très touchées comme le Grand Est, les Hauts de France et l'Ile de France, ou des Régions très peu touchées comme toute la façade Atlantique.

Il était évident qu'il ne serait ni possible ni raisonnable de réouvrir les vannes comme avant le 16 mars. Mais les orientations annoncées hier sur le chapitre des transports confortent une impression de confusion et maintiennent de fortes inquiétudes pour la suite : les collectivités locales autorités organisatrices demandent aussi à l'Etat des précisions sur les compensations financières sur la diminution des recettes tant par l'effondrement du trafic que par la chute des rentrées par la fiscalité locale, du fait de la mise en sommeil d'une partie de l'activité économique et des dégâts qui se préparent... Là dessus, pour l'instant, les messages restent confinés !

Comments

[Rémi]

Avec toutes les contraintes édictées ci-avant et en essayant de limiter au maximum l'utilisation de la voiture, je vois une solution qui a énormément de marges de progression en France, et dont on parle rarement ici (sauf pour des histoires de panneaux sur quelques boulevards) : le vélo.



Alors certes, j'anticipe certains commentaires : oui, celui qui habite de l'Essonne et bosse à Roissy ne prendra pas son vélo. Ça n'est pas l'idée. Mais si celles et ceux qui habitent à une distance "raisonnable" de son lieu de travail prennent un vélo, c'est autant de place dans les TC pour les autres par effet de glissement.



À titre perso, c'est bien ce que je compte faire : en dehors du télétravail, je troquerai mon trajet en TC Val-de-Marne→centre de Paris par une dizaine de km de vélo. Ça fait longtemps que l'idée me trottait en tête, et entre les grèves et la pandémie il est temps de tenter. Je laisse donc bien volontiers mes maigres m² théoriques (entre 3 et 4 entendais-je à la radio) de RER à qq'un qui viendrait de plus loin.



Il y a donc une redistribution MASSIVE de l'espace public à entreprendre au profit des piétons (distanciation), vélos et TC (pour tenter de compenser un tant soit peu les pertes d'usagers) dans les zones denses, et favoriser le vélo dans les zones un peu moins denses.



Salutations

[Kiffer Michel]

Bien d'accord avec ORT; ce virus est d'ores et déjà en train de porter un coup fatal aux transports en commun quels qu'ils soient, même à l'aérien. Sauf que pour ce dernier, les constructeurs et les compagnies sont déjà en train de prétendre que le système de clim. des aéronefs garantit un excellent renouvellement de l'air capable d'emporter immédiatement M. Covid-19 vers l'extérieur. Il me semble que les trains et les transports urbains sont également bien climatisés.

Bref, on va assister à une ruée sur la bagnole…. Je suis très pessimiste!

[Iegou]

Le charme de la période présente est le déluge de gesticulations de ceux qui savent mieux que les autres, mais à qui personne ne songerait confier la moindre responsabilité. La vie est parfois mal faite.



Sinon on peut essayer de réfléchir et de trouver des marges de manœuvre. Par exemple dans le métro parisien cela pourrait consister à rouvrir dans un premier temps les stations principales, et de rendre obligatoire le port du masque (distribué gratuitement à l'entrée).



Quoi que l'on fasse il y aura toujours des angles morts et des mécontents. C'est la caractéristique des lignes de crête. Il faut néanmoins avancer, prudemment mais fermement.



Je trouve par contre que le volet "les jours heureux du monde d'après" tarde un peu à s'ouvrir, alors que c'est un chantier considérable si on s'en donne la peine. J'ai lu que les Hollandais avaient beaucoup avancé sur ce sujet, mais ce ne sont que des Hollandais, après tout...



https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/27/amsterdam-parie-sur-le-donut-pour-sortir-de-la-crise_6037883_3234.html

[Colrin]

Pas un membre du gouvernement n'a probablement pris le métro aux heures de pointe durant les dix dernières années. Quand à leur faire comprendre que certaines personnes n'ont pas les moyens de se payer une voiture ni même un vélo, c'est pas demain la veille...

[chris2002]

Seule solution pour appliquer strictement les règles du gouvernement : fermer complètement les transports publics de la région parisienne (et des régions où les transports sont les plus chargés). Et tant pis pour les personnes qui n'ont pas d'autres choix...



Alors oui ce n'est pas une solution, mais il est illusoire de trouver une solution qui respecte les règles du gouvernement. Surtout quand on entend que la RATP pense pouvoir assurer seulement 70% du trafic normal...