Le matériel du métro de Lyon
Le MPL75 pour les lignes A et B
En février 1974, la Société d’Economie Mixte du Métro de Lyon confiait à Alsthom et Brissonneau-et-Lotz le marché de construction de 21 rames de 3 voitures sur pneumatiques composées de deux motrices et une remorque intermédiaire. Le premier train prototype fut livré en août 1975 à l’atelier de La Poudrette. Comme à Marseille, les rames étaient dessinées par Philippe Neerman.
Premières rames MPL75 à l'atelier de La Soie. Les livraisons ont été effectuées par voie ferrée, en utilisant le raccordement avec le Chemin de fer de l'Est de Lyon. La différence de ton entre la caisse et le nez des rames tient au choix d'une face en polyester, avec une peinture différente. (Archives Keolis)
Une deuxième tranche de 11 rames était commandée en 1978 pour assurer le prolongement de la ligne B à Jean Macé, effectif en septembre 1981, et le renforcement de l’offre compte tenu du succès auprès du public. Une remorque supplémentaire fut livrée pour former un premier train de quatre voitures : malgré l’amélioration des conditions de transport, la décision de généraliser cette composition ne fut pas prise.
Les caisses du MPL75 sont en aluminium soudé, tandis que les extrémités sont composées de panneaux de polyester. Les motrices disposent d’un vaste pare-brise frontal et d’un poste de conduite dégageant une large visibilité. Les rames sont équipées d’attelages automatiques Scharfenberg mais ceux-ci ne sont utilisables qu’en secours.
Le bogie, à roulement et suspension pneumatiques, dispose d’un large empattement offrant un confort de roulement satisfaisant limitant les tressautements. Les deux bogies des motrices sont motorisés, procurant au matériel des conditions d’adhérence satisfaisantes (motorisation aux deux tiers) et une puissance massique de 11,12 kW/t.
Les larges (1, 07 m !) et moelleuses banquettes étaient initialement orange, couleur historique du métro, puis ont viré au marron foncé. Les banquettes arrivent au plus près des portes, ce qui ne facilite pas les échanges de voyageurs aux heures d'affluence. En revanche, l'intérieur se révèle des plus lumineux et évidemment confortable. Les parisiens en visite à Lyon étaient surpris de la largeur des caisses. (Archives Keolis)
En 1997, une première rénovation fut engagée : les rames perdaient leur livrée orange au profit d’une association blanc-gris-rouge. A l’intérieur, les banquettes passaient au bleu ciel. En 2011, afin d’augmenter la capacité des rames, une seconde rénovation fut engagée avec l’installation de banquettes transversales, à l’assise particulièrement raide, mais dégageant un large couloir.
C’est désormais le système d’exploitation qui est en cours de renouvellement avec l’installation d’un pilotage automatique de technologie numérique.
Lyon - Station Cordeliers – ligne A – 29 septembre 2012 – Les MPL75 ont particulièrement bien résisté à l’épreuve du temps. Ce matériel confortable devrait encore servir le réseau jusque vers 2030. © transporturbain
Le MCL80 pour la ligne C
En 1974, la ligne à crémaillère Croix-Paquet – Croix-Rousse avait été confiée à deux motrices SLM – Winterthur dont la capacité s’était rapidement retrouvée insuffisante lors du prolongement à Hôtel de Ville en 1978. Une troisième motrice avait été commandée, mais le prolongement à Cuire prévu en 1984 nécessitait une augmentation plus importante de la capacité.
Lyon - Station Croix-Paquet - 1981 - Transition éphémère entre les motrices Winterthur et les MCL80 sur la ligne C, rapidement sous-capacitaire. Noter l'alimentation par fil aérien et non par troisième rail, et bien sûr le roulement sur fer comme la présence de la crémaillère. (Archives Keolis)
En 1980, le STCRL commanda au groupement Alsthom - SLM Winterthur cinq rames MCL80 composée de deux motrices à roulement sur fer, à crémaillère débrayable pour la section en adhérence Croix-Rousse – Cuire. Elles sont alimentées par caténaire et non pas par troisième rail. L’architecture générale est similaire au MPL75, mais la chaîne de traction est adaptée aux caractéristiques particulières de la ligne C.
Lyon - Station Croix-Paquet - ligne C - 29 septembre 2012 - Vue classique de la ligne C descendant vers Hôtel de ville. Les MCL80 arborent désormais la classique livrée appliquée depuis le milieu des années 1990 sur les MPL75. © transporturbain
La toiture est renforcée pour accueillir le pantographe et les résistances du freinage rhéostatique. Compte tenu de la pente de 17 %, les MCL80 sont également équipés d’un freinage électrique par récupération, d’un frein mécanique à tambour et d’un frein pneumatique complétés d’un dispositif de cliquet anti-recul.
En 2009, les 6 rames ont été envoyées en rénovation sur les bases adoptées pour la première opération des MPL75, le bleu des banquettes étant toutefois remplacé par un élégant rouge.
Le MPL85 pour Maggaly
Initialement, la quatrième ligne de métro devait être exploitée par une déclinaison à quatre caisses du MPL75. Le choix d’automatiser la ligne a entraîné une révision des orientations, en faveur de trains plus courts mais plus fréquents.
Le MPL85 est ainsi composé de deux voitures comprenant chacune un bogie moteur et un bogie porteur. La motrice impaire est systématiquement tournée côté Vénissieux, le pilotage automatique nécessitant l’orientation des rames dans le même sens. Les 14 premières rames, sur une commande de 36, ont été livrées avec un poste de conduite provisoire, en attendant la mise en service du pilotage automatique.
L’aménagement intérieur est similaire aux MPL75 hormis l’adoption de galettes revêtues de tissu vert bouteille pour les sièges et l’installation de miséricordes sur l’une des plateformes.
Des évolutions ont été apportées au diagramme pour augmenter la capacité, d’abord par le retrait d’un bloc de siège sur deux des trois plateformes et ensuite par le réaménagement d’une extrémité de la motrice paire avec l’installation de miséricordes longitudinales, et plus récemment par la transformation complète des aménagements pour généraliser le diagramme à l’anglo-saxonne.
Lyon - Station Grange Blanche - 7 avril 2012 - Une MPL85 à l'aménagement intérieur modernisé pour augmenter la capacité par des banquettes transversales. © transporturbain
MPL16 : renouveler le parc existant et augmenter la capacité du réseau
Les MPL75 ont accompagné la naissance du métro lyonnais. Après 40 ans de service, en dépit d'un bon état général et de 2 rénovations des aménagements intérieurs, l'heure du renouvellement devenait nécessaire.
La stratégie définie par le SYTRAL intègre la nécessité d'augmenter la capacité du réseau et de tenir compte des contraintes du réseau. En premier lieu, l'objectif concerne l'extension de la ligne B vers le pôle hospitalier Lyon Sud, mise en service le 20 octobre 2023, nécessite du matériel supplémentaire et là aussi un accroissement du débit de la ligne... tout en composant avec le terminus à voie et quai unique des Charpennes. C'est ainsi que s'est imposée l'automatisation de la ligne B pour resserrer l'intervalle sans investir lourdement (et sous quels délais ?) sur l'infrastructure. Ensuite, la ligne D sera équipée, sachant que la fréquentation continue d'augmenter et qui, malgré un intervalle de 2 minutes, ne dispose que de rames MPL85 composées de 2 voitures.
La ligne B a été considérée prioritaire, car pouvant libérer les MPL75 pour renforcer l’exploitation de la ligne A, avant d’envisager ultérieurement le remplacement du matériel historique du réseau.
Ainsi est donc né le projet MPL16. Il est fondé sur des modules de 2 voitures, comme le MPL85, pouvant circuler en solo ou en unité multiple. Conséquence de ce choix discutable (l’ensemble des stations et centre de maintenance des lignes A/B étant conçu pour des rames à 4 caisses), l’absence d’intercirculation sur la totalité de la rame, qui est pourtant devenue un standard de conception pour tous les matériels modernes.
L’appel d’offres MPL16 prévoyait 30 rames en tranche ferme et une option de 10 rames supplémentaires. Challengé par CAF, Alstom a remporté le marché pour un montant de 140 M€ soit 4,66 M€ le module de 2 voitures. La première rame a été livrée le 26 avril 2019 à l'atelier de La Poudrette à Vaulx en Velin.
Gare d'Oullins - 20 octobre 2023 - Croisement de deux MPL16 au premier jour du prolongement vers le pôle hospitalier Lyon Sud. Le choix de rames de 2 voitures laisse sceptique alors qu'augmente la fréquentation du réseau. © transporturbain
Pour la ligne B, l’exploitation avec des trains de 2 voitures constitue en apparence une régression par rapport aux MPL75 composées de 3 caisses. Le SYTRAL annonce une compensation par la fréquence, du fait du retournement automatique aux Charpennes qui réduit le temps d’occupation de la voie unique. La ligne B sera exploitée avec des couplages de 4 voitures à la mise en service du prolongement vers le pôle hospitalier Lyon Sud, dont la mise en service est prévue en 2023.
Pour la ligne D, l’objectif est de rendre possible soit une exploitation par un nombre accru de rames de 2 voitures avec un intervalle réduit à 90 secondes ou un service en couplages de 4 voitures (2 MPL85 ou 2 MPL16) avec un intervalle porté à 2 min 30. La seconde option, plus logique (l’alternance de trains courts et longs étant difficile à gérer dans les stations les plus chargées), semble tenir la corde.
Le MPL16 est une rame de 36,1 m de long, 2,89 m de large et 3,45 m de haut, pouvant accueillir au total 325 places dont 64 assises. La configuration de l’aménagement est très proche de la dernière rénovation du parc existant et conserve la disposition à 3 portes par face, dont la largeur passe de 1,30 m à 1,50 m. Ces rames pourront circuler jusqu’à 80 km/h… sur le plat car avec 580 kW et 10 tonnes de plus que le MPL85, le nouveau matériel présente une puissance massique inférieure à son aîné. Pourtant, le bas de caisse a été réduit à sa plus simple expression en éliminant les jupes inférieures. Conséquence : des travaux supplémentaires seront réalisés sur l’infrastructure pour supporter l’embonpoint du nouveau matériel !
Le nouveau matériel repose sur la plateforme X’Trapolis, adaptée pour le roulement sur pneumatiques. On remarque, par rapport aux actuels matériels lyonnais, la réduction de la taille des vitres latérales, en partie masquée par les aplats de noir sur la livrée. Il est vrai qu'avec une disposition des sièges dos aux fenêtres, les grandes baies du matériel actuel sont amputées de près d'un quart de leur hauteur, réduisant l'intérêt de vitres de grand format, ce qui, au passage, simplifie la conception du train. Même chose sur la face frontale. Seule la surface vitrée sur les portes est accrue.
Première image des aménagements intérieurs : la faible taille des fenêtres s'explique par la configuration des dossiers des assises et la présence des plans dynamiques sur écran. (document SYTRAL)
Sur le MPL16, on remarque aussi l’apparition d’une girouette frontale indiquant la destination, mais l’écran est de taille bien faible pour une utilité réelle pas très avérée, tous les trains faisant le même trajet. Les nouveaux thermomètres dynamiques de ligne, une première sur le métro lyonnais, semblent plus réussis. D’autres écrans, de taille réduite, sont aussi installés à bord des rames, dont la hauteur sous plafond est réduite sur les extrémités de caisse, pour implanter les blocs de climatisation (comme sur les MP05 parisiens), la grande nouveauté pour les voyageurs, tout en respectant le gabarit du réseau.
Enfin, reste à évaluer la qualité de l’interface entre le matériel roulant et le pilotage automatique avec pour conséquence le niveau de confort, en particulier au démarrage et au freinage. Certains métros automatiques modernes montrent que ce n’est pas vraiment un détail, qui, au demeurant, avait été relativement bien maîtrisé avec Maggaly et le MPL85.
Et les trois SLM-Winterthur ?
Les trois motrices acquises entre 1974 et 1978 pour la ligne C, avant la livraison des MCL80, ont connu une fin prématurée puisqu’elles ont été retirées du service en 1984. L’une d’entre elle a été revendu à Alstom pour différents essais techniques. Les deux autres n’ont toujours pas trouvé preneur et demeurent la propriété du SYTRAL, malgré plusieurs tentatives de revente. Malheureusement, leurs caractéristiques (plancher haut sans emmarchement, voie normale) réduit fortement le nombre de candidats potentiels.