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transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Métros et tramways de Valence

Des tramways aux influences françaises

Troisième agglomération d’Espagne après Madrid et Barcelone, avec un peu plus d’un million d’habitants, Valence était un des points de convergences des lignes secondaires à voie métrique, dont les premières avaient atteint la ville en 1888. Trois ans plus tard, les premiers tramways faisaient leur apparition, entre Empalme et Betera, avant de connaître un développement régulier jusqu'en 1914. Valence avait connu un important essor du tramway, avec une multiplicité de compagnies, gérant parfois une seule ligne. L'électrification avait débuté en 1899, sous l'influence d'une compagnie dominée par des capitaux français au point que la Compañia General de Tranvias Electricos de Valencia fut surnommée localement « La Lyonesa ».

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Valence - Placa de la Reina Sofia - 19 février 2012 - Clin d'oeil à l'influence lyonnaise sur le développement des tramways ? L'EMT a fait l'acquisition d'autobus Renault Agora, fabriqués en région lyonnaise... © transporturbain

Parallèlement, les chemins de fer suburbains avaient été constitués autour de Valence avec notamment l'importante gare située dans le quartier de Santa Monica : Pont de Fusta concentrait à partir de 1891 la tête de lignes en direction des faubourgs nord de la ville. Leur électrification fut engagée après la modernisation du réseau urbain, à partir de 1911. En 1924, l'ensemble des voies étroites, urbaines et suburbaines, furent confiées à une seule entreprise, la Compañia General de Ferrocariles et Tranvias.

En 1931, elle gérait 31,5 km de voies urbaines (avec 6 lignes) et 49,2 km suburbains avec 10 lignes. A cette époque, il était déjà question de relier les deux ensembles suburbains Nord et Sud aboutissant respectivement aux gares de Pont de Fusta et de Jesus.

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Valence - Pont de Fusta - Vers 1966 - Les tramways de Valence venaient desservir la gare origine des trois lignes suburbaines. Hormis la couleur, l'allure des caisses de ces motrices évoque un lointain cousinage lyonnais, variation sur le thème des Buire Nouvelles"de l'OTL... © Ch. Buisson

Le réseau pâtit de la guerre civile, puis de la seconde guerre mondiale et du régime franquiste, avec un retard important sur le matériel roulant. Les tramways urbains furent progressivement supprimés (le dernier circula le 20 juin 1970), au profit de trolleybus : le premier circulait le 18 juillet 1951, mais ils ne circulèrent que durant 25 ans, disparaissant à leur tour le 22 mars 1976. Malgré cette conversion, partielle, le parc de tramways bénéficia d'une modernisation, sommaire, avec constitution de 4 motrices articulées « deux pièces cuisine » sur la base de matériel ancien, mais aussi de 70 motrices à caisses longues avec équipements de traction de réemploi. Pour autant, les tramways étaient dans le collimateur et la dernière ligne était convertie à l'autobus le 20 juin 1970. On rappellera à ce titre que le régime franquiste avait prononcé l'abandon de tous les transports urbains électriques en surface.

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Valence - Placa del Ayuntamiento - 19 septembre 1966 - Une 400 à l'allure relativement moderne, quoique constituée d'équipements de réemploi : ultime évolution du réseau urbain avant son démantèlement. © Ch. Buisson

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Valence - Pont de Fusta - 30 juin 1984 - Le terminus du Trenet avec sur les voies de remisage cet ensemble composé de 2 motrices type S et une remorque. Presque le matériel le plus moderne pour l'époque : 12 motrices et 6 remorques ont été rachetées en Belgique à la SNCV en 1971-1972. (cliché X)

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Valence - Pont de Fusta - 17 novembre 1984 - L'environnement de la gare de Pont de Fusta contraste avec le matériel antédiluvien... La modernisation des transports urbains en Espagne fut un des grands chantiers après la restauration de la démocratie. (cliché X)

L’état du réseau était des plus préoccupants, avec un matériel roulant obsolète et bigarré : les lignes aboutissant à la gare de Pont de Fusta avaient même récupéré des motrices S des tramways vicinaux de Belgique (SNCV) : presque moderne par rapport aux autres voitures datant des années 1930. L’infrastructure n’était guère en meilleur état, trahissant des décennies de sous-investissement.

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La Cadena - 1987 - Matériel obsolète, voies moyennement entretenues et un chemin de fer qui se fraie une place dans un espace de plus en plus occupé par les voitures. Les enfants jouent sur les quais, peut-être amusés par l'allure passablement dépassée du matériel ? (cliché X)

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Valence - Pont de Fusta - 29 janvier 1991 - Après la reprise par les FEVE en 1987, le Trenet mit progressivement fin à l'exploitation des automotrices Macosa de 1954-1955 associées à des remorques réversibles. (cliché X)

La renaissance

L'actuel réseau à voie métrique est composé de 9 lignes, dont 6 en chemin de fer léger suburbain et 3 lignes de tramways. Il totalise 156,4 km d’infrastructures, dont 87 en voie unique et 25,3 km en tunnel, desservant 138 stations. Il a transporté environ 60 millions de voyageurs en 2016.

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La Pobla de Vallbona - 23 juillet 2017 - Quand le métro prend la clé des champs : la diamétralisation des lignes secondaires modernisées a doté Valence d'un réseau de proximité assurant une desserte fine du coeur d'agglomération. La rame 4311 assure un service sur la ligne 2 en direction de Lliria. (cliché X)

Les années 1980 allaient être marquées par une importante vague de renouvellement des voies et du matériel roulant, avec l’arrivée de la série 3700 à partir de 1987, liée à la construction de sections souterraines afin de créer des diamétrales nord-sud et est-ouest, améliorant l’accès au cœur de la cité. Cependant, les 3700, similaires aux motrices néerlandaises de Rotterdam, ont été retirées du service prématurément, suite à l’accident de 2006, et en raison d’une puissance trop faible de ce matériel.

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Empalme - Ligne 1 - 9 octobre 2007 - La série 3700 ne peut cacher sa parenté néerlandaise. On note au passage la configuration de la bifurcation d'Empalme, sur la première section nouvelle du réseau. © A. Knoerr

La première section, Empalme – Safranar, était mise en service le 8 octobre 1988, 100 ans après l’ouverture des premières lignes, selon un itinéraire globalement orienté nord-sud, sur une longueur de 6,7 km. Elle récupérait les dessertes de Lliria, Betera et Rafelbunyol qui aboutissaient jusqu’alors à la gare de Pont de Fusta. Cette liaison nord-sud est desservie par les lignes 1, 2 et 7.

Dans les années 1990, une liaison souterraine orientée est-ouest a été progressivement constituée, débutant en 1995 par une section Alboraya – Palmaret – Alameda longue de 3 km et achevée en 2007 avec la mise en service du prolongement à Maritim Serreria. Elle accueille elle aussi trois lignes, numérotées 3, 5 et 9. La création de cet itinéraire souterrain est-ouest a fortement modifié la géographie du réseau, de sorte à constituer un maillage efficace du centre de Valence.

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Burjassot - 29 avril 2017 - Les constuctions viennent parfois au plus près de la voie ferrée mais l'effet de coupure urbaine existe, en dépit des franchissements dénivelés. Gageons que la réhabilitation de ces immeubles prend en compte la protection acoustique... (cliché X)

La dernière extension souterraine de ce réseau remonte à 2010 dans la traversée d’Alboraya. En revanche, la desserte de Riba Roja de Turia, assurée par une ligne nouvelle de 9,5 km parallèle aux voies de la RENFE, a ouvert en 2015 et constitue pour l’instant l’ultime évolution de ce réseau.

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Valence - Station Alameda - 19 février 2012 - Cette station est située sous le grand parc urbain de Turia, implanté dans le lit d'un fleuve dévié après une dramatique inondation de la ville en 1957. Il en résulte un parcours des plus agréables, contournant par le nord l'enceinte historique de la ville. Elle marque la convergence des deux branches orientales (Maritim Serreria et Rafelbunyol) de l'axe est-ouest. Sobre et élégante, elle est également très bien entretenue. © transporturbain

Des tramways en complément

En revanche, les lignes 4, 6 et 8 sont desservies par des tramways. Valence fut d’ailleurs la première ville espagnole à réintroduire le tramway moderne, le 21 mai 1994, avec l’inauguration de la ligne 4, transformant l’ancienne ligne du « trenet » complètement obsolète.

Elle améliore l’accès des quartiers situés au nord de Valence et dessert l’important domaine universitaire, tout en donnant accès aux plages. Cependant, cette ligne tangente le cœur de ville par des quartiers relativement récents.

Longue de 15,9 km, elle dessert 33 stations depuis son achèvement en 2011, dotant la ligne de 3 terminus au nord, dont celui du Parc des Expositions qui n’est utilisé que pendant les foires.

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Valence - Carrer del Doctor Zaragosa - 19 février 2012 - La ligne 4 dessert les quartiers nord-ouest de l'agglomération, traversant des faubourgs denses, comme ici celui de Benimaclet. L'insertion urbaine est assez classique, hormis quelques ouvrages en périphérie pour franchir des échangeurs autoroutiers et la présence de boucles au terminus, les 3800 Siemens-Duwag étant unidirectionnelles. © transporturbain

Première particularité de cette ligne, les terminus sont en boucle car le matériel U-3800 Siemens-Duwag ne dispose que d’une seule cabine de conduite.

Seconde singularité : la station Pont de Fusta, elle aussi munie d’une boucle. Elle a été installée à l’emplacement de l’ancienne gare du trenet et les rames de la ligne 4 font donc un crochet pour desservir le quartier d’habitations, à proximité de l’immense « coulée verte » à l’emplacement du fleuve canalisé, au demeurant des plus agréables. Cependant, le crochet allonge la durée du trajet entre les quartiers nord, l’université et les plages.

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Valence - Carrer d'Almassora - 19 février 2012 - A l'emplacement de l'ancienne gare, située derrière le photographe, une large avenue a été tracée, accueillant la première ligne de tramway moderne de Valence, et d'Espagne. Particularité du site : une double plateforme et une boucle au pied de l'ancienne gare. La rame ici en photo passe le long du quai qu'elle va bientôt desservir après avoir emprunté la raquette. Atypique, mais évite un rebroussement. © transporturbain

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Valence - Carrer de la Sequia de la Cadena - 19 février 2012 - Une rame Flexity dans la livrée habituelle des tramways de la ville. Certaines rames commandées pour la ligne 8 sont en revanche blanches, comme les rames du métro. © transporturbain

La ligne 8 a été mise en service le 28 septembre 2007 et constitue l’une des singularités du réseau : avec seulement 4 stations, dont un terminus souterrain commun avec les lignes 5 et 7 des FGV, elle donne l’impression d’une réalisation en surface, plus économique, d’une section qui aurait été envisagée souterraine. D’une longueur de seulement 1200 m, elle procure un second accès aux plages par le terminus initialement baptisé Neptu et récemment rebaptisé Marina Reial. Cependant, l’approche à pied s’effectue au travers d’un parking pas des plus plaisants.

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Valence - Maritim Serreria - 22 février 2012 - Correspondance quai à quai entre le métro et le tramway dans cette station qui résume à elle la conception quelque peu court-termiste du réseau. La création de la ligne 6, assurant la jonction avec la ligne 4, rattrape quelque peu ces errements. © Th. Assa

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Valence - Neptu - 19 février 2012 - Arrivée au terminus de la ligne 8, désormais baptisé Marina Royale, d'une rame Flexity. Dommage que l'accès aux plages ne nécessite la traversée d'un disgrâcieux parking, parfois transformé en piste de kart comme c'est ici le cas (à gauche du cliché). © transporturbain

A la même date, la ligne 6 était aussi mise en service, assurant la jonction entre les lignes 4 et 8, créant une ramification de plus au tronc commun entre Les Arenes et Primat Reig. La ligne 8 ne constitue donc qu’un renfort de la ligne 6.

Un réseau stabilisé… mais manquant de cohérence

Le réseau de Valence comprend donc 4 lignes (1,2, 3 et 9) combinant la desserte centrale et une fonction régionale. Les lignes 5 et 7 souterraines ont une dimension plus urbaine. Enfin, les lignes 4, 6 et 8 sont des tramways. Le réseau manque cependant de cohérence lié à une accumulation de décisions à court terme, sans plan stratégique d’ensemble, ce qui a par exemple conduit à modifier à plusieurs reprises l’organisation des lignes souterraines afin de faire de la gare un point central du réseau, surtout avec l’arrivée de la ligne à grande vitesse depuis Madrid.

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Le réseau Metrovalencia a désormais atteint sa maturité. Il procure un bon niveau de service autour de la ville et facilite l’accès aux quartiers centraux par un maillage assez dense, combinant finalement une vocation de RER et celle d’un métro.

Le système tarifaire crée une distinction entre les autobus et les lignes ferrées, du moins pour les titres ordinaires. Les cartes journalières et abonnements sont en revanche multimodaux, avec 4 zones concentriques.

Les stations les plus récentes méritent d’être découvertes, en particulier celle d’Alameda. Celles mises en service à la fin des années 1980 sont en revanche un peu plus datées et plus sombres. Comme tous les réseaux espagnols, la propreté y est remarquable.

Pour une agglomération d’une telle taille, l’armature désormais stabilisée du réseau FGV procure un maillage correct des principaux corridors d’habitat de la métropole. La transformation des lignes à voie métrique, dans un état déplorable au début des années 1980, est spectaculaire. L’ancien « trenet » a fêté en 2016 son 125ème anniversaire marquant cette évolution. Le tramway mériterait en revanche d’être simplifié, en supprimant la ligne 8 au profit d’un renfort de la ligne 6.

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Valence - Avenida del Marques de Sotelo - 19 février 2012 - Devant la gare du Nord (située au sud de la ville), convergent de nombreuses lignes d'autobus. Le parc de l'EMT est assez diversifié. Ici un Scania Omnicity avec un carrossage en partie local, notamment en face arrière. © transporturbain

La desserte du quartier de Natzaret constitue la première extension du réseau, depuis la gare centrale (plutôt les gares, étant donné que AVE et trains classiques disposent de leurs propres installations, différence d’écartement oblige), avec un tracé en partie souterrain, mais sans raccordement aux tunnels existants. Les travaux ont débuté en 2007 mais ont subi les conséquences de la crise financière de 2008. Ils n'ont repris qu'en 2019 avec une mise en service de la nouvelle ligne 10 Alacant - Natzaret le 17 mai 2022. Elle restera isolée jusqu'à la création de la section Natzaret - Marina. Le choix d'un tracé en tunnel sur 2200 m peut questionner compte tenu de la généreuse largeur des voiries : il y aurait eu probablement matière à réduire le coût du projet et à améliorer les correspondances avec le réseau existant aux abords de la gare.

Le service est assuré à l’aide de 4 types de matériel : 2 pour le métro, alimenté par caténaire en 1500 V et 2 pour le tramway alimenté en 750 V. Les sections souterraines sont équipées d'un système de pilotage automatique avec conducteur, sur 25,3 km.

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Le matériel moderne est agréable, quoique l’intérieur des 4300 apparaisse un peu frustre. Le gabarit de 2,55 m est optimisé par la disposition des places assises sur des banquettes transversales. Du côté des tramways, les 3800 marquent le pas face aux Flexity (4200), du fait d’un niveau sonore élevé et d’un roulement manquant singulièrement de douceur.

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L'Alcudia - 10 août 1998 - Les premières automotrices du metrovalencia ont été rapidement retirées du service après l'accident de 2006. Un couplage est ici vu sur la section sud de la ligne 2, dans une zone maraichère et fruitière. (cliché X)

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Rafelbunyol - 5 avril 1996 - Les automotrices 3900 ont accompagné le développement du réseau notamment avec la jonction est-ouest. La rame 3902 est ici au terminus de la ligne 3 (aménagé sans tiroir d'arrière-gare), situé au centre d'un quartier résidentiel. (cliché X)

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