Canalblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Citadis : une gamme de tramways à succès

Indéniablement, la résurrection du tramway en France est associée aux rames Citadis d’Alstom. Si les TFS ont ouvert la voie, le succès commercial du Citadis peut incarner quasiment à lui seul l’image du tramway français moderne puisqu’il représente plus de 70 % des tramways circulant en France.

Une naissance sur une défaite

Présenté pour la première fois lors de la candidature d’Alsthom (avec un h à l’époque) au projet de tramway de Clermont-Ferrand, le Citadis est devenu le véritable tramway français standard, en dépit des apparences et de la personnalisation des livrées et de la forme des extrémités dans les différentes villes.

Si les premières esquisses d’un tramway moderne baptisé Citadis remontent aux années 1970, le véritable lancement du produit résulte de la défaite d’Alsthom lors de l’appel d’offres du tramway de Strasbourg. Le TFS avait été écarté au profit de l’Eurotram d’ABB, qui proposait lui un plancher bas intégral.

Première version : un descendant direct du TFS

Citadis est un produit modulaire, ce qui, au milieu des années 1990, était assez innovant, par sa longueur de 24 à 43 m de long, et sa largeur de 2,30 à 2,65 m.

Dans un premier temps, Alstom valorisait dans un premier temps son partenariat avec LHB, avec qui avaient été réalisées les rames de Magdeburg, composées de deux caisses longues encadrant une caisse courte, donc assez proche du TFS. Ces rames étaient à plancher bas partiel avec une marche au-dessus des bogies moteurs. Elles ont été vendues en France à Montpellier (version 301 au gabarit 2,65 m, allongées depuis en version 401) et à Orléans (version 301 au gabarit 2,32 m) et dans le monde à Dublin et Melbourne (sur bogie Solfège). Elles disposent de 4 portes doubles et 2 portes simples situées derrière les cabines de conduite.

La chaîne de traction Onix avait déjà fait son apparition sur les derniers TFS produits, notamment pour Grenoble. Elle a été reconduite sur les Citadis.

2001_T1odysseum_manara

Montpellier - Odysseum - 2001 - Les premiers Citadis disposent de caisses longues, comme les TFS. Les bogies LHB sont très adaptés sur une ligne comprenant de nombreuses courbes compte tenu de l'organisation de la voirie dans la ville. © J.H. Manara

0405_A-la-source-chateau2

Orléans - Domaine universitaire - avril 2005 - Les rames livrées pour la ligne A d'Orléans diffèrent par quelques différences esthétiques sur la face frontale et par un gabarit plus restreint, de 2,32 m au lieu de 2,65 m. © transporturbain

Et arriva le plancher bas intégral et la personnalisation

Alstom parachevait parallèlement la conception d’un nouveau bogie, baptisé Arpège, pour constituer des rames à plancher bas intégral, sans aucun emmarchement intérieur. Sur celui-ci, les roues sont reliées à l’aide d’un pont (initialement produit par RVI, et maintenant par Texelis) afin de former un « essieu », équipé d’un côté d’un moteur, de l’autre d’un équipement de freinage. Chaque moteur est associé aux roues en ligne. En revanche, le bogie Arpège ne pivote pas :  c'est par l'architecture articulée à 5 caisses sur 32 m que la rame peut s'insérer en courbe. Les premiers Citadis ainsi équipés, type 302, ont été commandés par le réseau de Lyon (longueur 32 m, gabarit 2,40 m).

Dans ces deux versions, le Citadis compensait l’un des défauts de la deuxième version du TFS (type Grenoble, Rouen, Paris), à savoir le manque de portes et leur extrême concentration au centre du véhicule. La version 302 comprend 4 portes doubles et 2 simples, situées derrière les cabines de conduite.

180408_T1feyssine3

Villeurbanne - Domaine universitaire de La Doua - 18 août 2006 - Premier Citadis à plancher bas intégral avec bogies Arpège, le modèle lyonnais a largement fait école en France au point de devenir le véritable standard français. © transporturbain

Le constructeur a également rompu également avec le principe de standardisation des caisses, du moins en apparence : si tous les éléments composant la caisse sont identiques d’une rame à l’autre, quelle que soit sa longueur ou sa largeur, le Citadis personnalise les faces frontales, chaque ville voulant se distinguer des autres, faisant au passage du tramway non pas un simple moyen de transport mais une sorte de signature urbaine.

Le Citadis s’adaptait aussi aux besoins de capacité, notamment par l’installation a posteriori d’attelages automatiques sur les rames destinées à la ligne T2 de Paris.

151011_T2coteaux2

Saint-Cloud - Les Coteaux - 15 octobre 2011 - Pour l'exploitation de la ligne T2 dont le succès ne se dément pas depuis son ouverture en 1997, la RATP exploite des Citadis couplés en unité multiple. Ce sont aujourd'hui les plus longues compositions de tramways en France avec 65 m et 436 places. © transporturbain

Caractéristiques techniques : difficile de résumer une telle diversité !

La longueur des Citadis 301 atteint 29,9 m, tandis que celle des Citadis 302 se situe autour de 32 m selon la forme du museau des rames, domaine personnalisable par chaque ville. Pour les Citadis 401 (rames de Montpellier allongées pour faire face au succès de fréquentation), la longueur 40,9 m et celle des Citadis 402 oscille autour de 43 à 44 m, toujours selon les formes d’extrémité.

Avec une puissance maximale à la jante de 688 kW pour une masse à vide de l’ordre de 38 t, le Citadis 302 bénéficie d’une accélération de 1,1 m/s² de 0 à 40 km/h et de 0,72 m/s² de 0 à 70 km/h. Au freinage, le Citadis atteint 1,3 m/s² en freinage maximal de service et 3 m/s² en freinage d’urgence.

Pour les rames de type 402, plus longues et donc plus lourdes, la puissance est portée à 880 kW avec un bogie moteur de plus, et offre des performances comparables en accélération et freinage aux rames de type 302.

311207_Cseyssinet5

Seyssinet - Boulevard de l'Europe - 31 décembre 2007 - Venant de franchir le pont de Catane, un des 50 Citadis 402 grenoblois, circulant ici sur la ligne C : ces rames sont également affectées aux lignes A et B, à fort trafic. © transporturbain

Les contraintes du plancher bas intégral et des coffres protégeant les bogies et certains appareillages électriques contraignent l’aménagement intérieur : les écarts selon les versions divergent peu, hormis sur les rames de Dijon et de Brest où des choix esthétiques brident la capacité assise. Sur une rame de type 302, la capacité assise atteint 56 places pour 201 places au total. En diminuant la capacité assise notamment autour des portes, la capacité peut atteindre 220 places. Sur les rames de type 402, La capacité assise est de 70 places pour 288 places au total, et 304 en cas de gabarit à 2,65 m.

La conception modulaire permet de varier les configurations y compris entre modules élémentaires. Ainsi, les caisses suspendues disposent de 2 portes encadrant une baie vitrée (cas des rames franciliennes à Tours, à Lyon, à Montpellier) ou d'une porte encadrée par deux baies (cas de Bordeaux et de Nice). Ainsi, les rames longues disposent de 5 ou 6 portes doubles et 2 simples.

Une troisième version pour Strasbourg

Pour remporter le marché lié au développement du réseau de Strasbourg, il fallait un tramway dont le gabarit dynamique était équivalent à celui des Eurotram, marqués par un bogie porteur sous les cabines pour diminuer le porte-à-faux. Cette version est dénommée Citadis 403. Deux avantages et non des moindres : 8 doubles portes et une meilleure stabilité en cas de collision latérale.

010907_CTSlandsberg3

Strasbourg - Avenue Jean Jaurès - 1er septembre 2007 - Pour l'emporter à Strasbourg, le Citadis a été décliné dans une nouvelle version, avec un bogie porteur situé sous la cabine dont la taille a été agrandie, confirmant la grande modularité de conception de cette gamme. L'efficacité des échanges a beaucoup progressé grâce à la généralisarion des doubles portes. © transporturbain

La puissance de ces rames plafonne à 725 kW avec une vitesse maximale de 60 km/h. Cependant, l’accélération atteint 1,25 m/s² de 0 à 40 km/h. Elles offrent 288 places dont 64 assises.

Un tramway qui se passe de ligne aérienne

Alstom a développé parallèlement à la solution de base par pantographe et ligne aérienne, la solution d’alimentation par le sol (APS), dont les débuts à Bordeaux furent difficiles mais le résultat – moyennant un certain surcoût – in fine probant avant d’être retenue par Angers, Reims, Orléans et Tours. A Nice, la première ligne est exploitée à l’aide munie de batteries compte tenu de l’absence de lignes aériennes place Masséna et place Garibaldi.

Alstom a ensuite développé une solution de recharge en station par le sol (SRS) en station de batteries d’autonomie plus courte (environ 1500 m).

APS et SRS sont des systèmes brevetés, ce qui ne facilitera pas la percée d’autres constructeurs sur ces réseaux.

220418_Btheatre2

Bordeaux - Place de la Comédie - 22 avril 2018 - Rame longue et alimentation par le sol : les rames bordelaises comptent aussi parmi les plus élégantes. Le tramway est aussi un objet urbain qui sait être esthétique. Bordeaux exploite 130 rames sur son réseau de 4 lignes : c'est la plus importante dotation de France, hors région parisienne. © transporturbain

010913_Apont-wilson3

Tours - Pont Wilson - 1er septembre 2013 - Du tramway à l'objet d'art, par définition un peu plus discutable. Le Citadis s'est plié aux considérations des designers sur le projet tourangeau. © transporturbain

180120_T2port-lympia4

Nice - Vieux Port - 18 janvier 2020 - Les rames des lignes 2 et 3 circulent en autonomie avec recharge ponctuelle pendant les arrêts avec une autonomie d'environ 1500 m même à 70 km/h. Sur la ligne 1, des batteries classiques rechargées pendant les parcours sous ligne aérienne permettent aux rames de traverser les places Masséna et Garibaldi. © transporturbain

SRS-alstom

SRS-alstom2

Les principes du Système de Recharge par le Sol des rames du réseau niçois. (documents Alstom)

Un premier bilan

Alstom envisageait un marché potentiel de 80 rames en France pour amortir le coût de développement du produit. Vingt ans plus tard, près de 2400 Citadis circulaient ou étaient en construction à circulés dans le monde entier, dont un peu plus de 1000 en France en 2018. Le succès à exportation du Citadis concerne essentiellement les réseaux neufs, souvent dans des marchés intégrés avec l'infrastructure.

Avant de poursuivre notre dossier avec les évolutions plus récentes du Citadis, il n'est pas inutile de dresser un premier bilan. Assurément, le produit d'Alstom est indissociable de la renaissance des tramways en France, car il a accompagné la quasi-totalité des réseaux apparus depuis 2000, à l'exception de Marseille, qui a préféré le Flexity de Bombardier, et Besançon, qui choisit l'Urbos de CAF. Les deux tiers des tramways circulant en France sont des Citadis.

Sa fiabilité ne peut guère être mise en défaut tout comme une certaine commodité de conception pour le mainteneur. En revanche, il n'est pas possible de ne pas évoquer ses points faibles :

  • les portes simples en extrémité, alors que l'accès aux stations s'effectue le plus souvent par leurs extrémités ;
  • le bogie Arpège n'aime pas les courbes car sa rotation est limitée à +/- 1 degré, imposant des ralentissements prononcés diminuant la vitesse commerciale. En comparaison, le bogie LHB des rames type 301/401 pivote de +/- 10 degrés et peut prendre les courbes à des vitesses supérieures de 10 à 15 km/h selon leur rayon. La faible rotation du bogie Arpège provoque aussi plus de crissements dans les courbes... et de l'usure ondulatoire dans les zones d’accélération et freinage et dans les courbes de grand rayon.

Suite du dossier

Publicité
Publicité
Publicité