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transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Les tramways de Nice : de l'apogée au déclin

 TNL : électrification et développement d’un réseau inteurbain cotier

L’électrification et l’extension du réseau urbain confiées aux TNL, associés à Thomson-Houston, le 18 septembre 1897, prouvaient que les règles publiques étaient souvent contournées puisque les travaux étaient lancés avant même que la contexture finale du réseau soit présentée aux élus niçois, et alors même que la rétrocession du réseau ne fut validée par la ville qu’en 1902.

Le réseau de base, celui des lignes à traction hippomobile, était évidemment réintégré dans une desserte à 4 lignes dont 3 partaient de la place Masséna (vers Californie, Saint Maurice et les abattoirs) et une ligne entre la gare PLM et le port. Compte tenu de l’extension de la ville, 4 lignes complémentaires étaient ajoutées au programme de construction sans opposition majeure :

  • 5 : Masséna – Gendarmerie
  • 8 : Rue de France – Gare Sud-France
  • 9 : Port – Riquier
  • 10 : Gare PLM – Place Risso

En revanche, 2 lignes centrales suscitèrent de plus vives polémiques auprès des riverains :

  • 6 : Masséna – Gambetta
  • 7 : Saluzzo – Potiers

Le cahier des charges du 18 février 1902 précisait la structure du réseau et les choix d’infrastructures. Le fil aérien était proscrit avenue de la gare, sur la place et rue Masséna et le boulevard Mac Mahon. L’écartement des rails était d’un mètre, le gabarit en largeur de 1,90 m et la vitesse maximale de 20 km/h. La double voie était préconisée sur toute les sections urbaines.

La définition des lignes était revue et amendée pour aboutir à un réseau de 12 lignes :

  • 1 : Masséna – Californie
  • 2 : Masséna – Saint Sylvestre
  • 3 : Masséna – Abattoirs
  • 4 : Port – Gare PLM – Rue Cluvier
  • 5 : Masséna – Saint Pons
  • 6 : Masséna – Gambetta
  • 7 : Saulzzo – Gambetta
  • 7bis : Masséna – Potiers
  • 8 : Rue de France – Gare Sud-France
  • 9 : Port – Riquier
  • 10 : Risso – Gare PLM
  • 11 : Masséna – Port

Il fallait ajouter à ce réseau, outre la transformation des lignes hippomobiles primitives la ligne expérimentale de Cimiez. Les travaux étaient donc engagés avant même la validation formelle du projet, en tenant compte de l’interdiction de travailler pendant la saison hivernale pour ne pas incommoder les touristes.

Sur la place Masséna, une gare terminus à 5 voies était établie sur une boucle comprenant 3 positions de départ et 2 d’arrivée.

Parallèlement, les travaux du réseau suburbain littoral étaient eux aussi engagés sur 3 lignes :

  • Masséna – Cagnes sur mer (12,5 km)
  • Masséna – Beaulieu (10,5 km)
  • Garibaldi – Contes (15,5 km)

CP-villefranche-beaulieu

La ligne du littoral était elle-même un objet touristique : le panorama sur la Méditerranée et les villages ne manquait pas de charme. Sur les hauteurs de Beaulieu, le tramway prend la pose avec une plateforme abondamment garnie pour l'occasion.

Au total, pour la construction des 12 lignes urbaines et les 3 premières sections du réseau suburbain, il ne fallut que 2 ans pour poser au total pas moins de 94 km de réseau (150 km de simple voie) ! Dès le 31 décembre 1899, les essais de la première des 100 motrices Thomson –Houston montées sur truck Brill, dotées de 2 moteurs de 35 chevaux, furent effectuées dans l’enceinte du dépôt de Sainte Agathe. Ces motrices jaunes et blanches étaient pour 30 d’entre elles à deux classes pour offrir une première classe, et 6 étaient aménagées en salon.  Les lignes étaient repérées par un code couleurs.

L’intégralité des lignes urbaines et suburbaines définies ci-dessus étaient exploitées au plus tard le 2 juin 1900, à l’exception de la section de Villefranche sur mer à Beaulieu qui dut attendre le 3 novembre 1900 après la fin des travaux d’élargissement de la route de la corniche.

L’offre du réseau urbain se caractérisait par une forte amplitude horaire du fait de l’activité urbaine croissante, de l’important trafic maraîcher et de la vie nocturne liée au tourisme. Ainsi, le service débutait à 5h30 pour se terminer vers minuit. Cependant, le premier départ de Cagnes sur mer, pour les fleuristes était prévu à 3h du matin ! Un kiosque des TNL fut édifié dès 1901 pour installer une billetterie et un bureau de renseignements au cœur du réseau. L’exploitation évoluait rapidement, les TNL souhaitant proposer un service circulaire en utilisant les différents raccordements entre les lignes. Enfin, le 6 décembre 1903, la dernière extension du réseau urbain était mise en service avec la desserte du parc impérial.

Sur le réseau du littoral, il fallut pas moins de 3 ans de travaux pour pouvoir atteindre Menton Garavan et créer une antenne entre la place Saint Roch et la place Caserta. Forte concurrence pour le PLM, la compagnie ferroviaire ne se priva pas de faire obstruction pour la construction des passages inférieurs ou supérieurs et interdire l’installation du terminus devant la gare de Menton. Finalement, les TNL se résolurent à déposer leurs voyageurs à 25 m au pied de la montée vers la cour de la gare. Le tramway arrivait à Menton dès le 22 décembre 1902, pour la partie urbaine, et la liaison avec la gare était opérationnelle le 13 juillet 1903.

La continuité technique de l’ensemble des lignes de Menton, Monaco, Nice et du littoral était assurée dès l’achèvement de la section Monte Carlo – Menton le 28 décembre 1903, autorisant la mise en service d’une exploitation de bout en bout, de Cagnes sur mer à Menton. Dès lors, les TNL régnaient sur 94,3 km de lignes dont 29 pour les 8 lignes niçoises, 12,1 km pour la ligne de Cagnes, 15,6 km pour la ligne de Contes et 37,6 km pour la ligne de Menton.

CP-nice-villefranche

Encore une vue de la ligne du littoral avec une motrice circulant sur la corniche à Villefranche sur mer. La route n'était encore faite que de terre battue et de gravier, et on aperçoit dans l'ombre du tramway une charrette tirée soit par un âne soit par un cheval.

Succès pour le tramway mais des difficultés techniques

Devant le succès de fréquentation, les TNL passaient de nouvelles commandes de matériel roulant : 20 remorques fermées et 6 motrices. Ils récupéraient aussi 12 baladeuses auprès des Chemins de Fer Nogentais, en les modifiant pour circuler sur une voie métrique. Les motrices primitives étaient également modifiées pour allonger leur caisse et leur empattement afin d’améliorer leur roulement.

Les TNL s’intéressaient à la marche en unité multiple (appelée « train-control ») de 2 motrices encadrant une remorque : 10 trains étaient commandés en 1904 avec des motrices de 80 chevaux, qui en réalité se trouvèrent d’une puissance insuffisante, ce qui entraînait leur interdiction par la Compagnie des Tramways Monégasques. Les TNL modifiaient les motrices en portant leur puissance à 84 chevaux, levant l’interdit.

CP-nice-massena 

Première tentative de rame réversible avec deux motrices encadrant une baladeuse sur la ligne de Monte-Carlo. La puissance s'avérant insuffisante, il fallut abandonner les compositions à trois éléments.  

Vint ensuite un argument à propos de disjonctions récurrentes du réseau monégasque mais il apparut que le problème venait plutôt du sous-dimensionnement des installations électriques.

CP-nice-roquebrune

Le tracé de la ligne du littoral reposait essentiellement sur la route de la corniche mais quelques ouvrages permettaient au tramway de circuler quand la route se faisait trop difficile : c'est le cas à Cap Martin où un court tunnel avait été établi.

Compte tenu d’une clientèle aisée grandissante, les TNL généralisaient la 1ère classe dès 1908 sur le réseau urbain. La compagnie engageait aussi la transformation de 32 motrices pour améliorer les échanges en supprimant l’accès sur l’angle des plateformes au profit d’accès latéraux, suivie par le même type d’opération sur les 6 motrices type Cagnes, les 6 motrices salon et 7 motrices du littoral. En outre, 16 baladeuses et 6 remorques fermées neuves étaient acquises portant l’effectif en 1910 à 146 motrices et 93 remorques.

Le réseau urbain continuait quant à lui de progresser avec l’ouverture d’une ligne de 2,2 km vers La Madeleine le 27 avril 1908.

Le succès ne concernait pas que le transport de voyageurs. La cimenterie de Contes fournissait un abondant trafic de marchandises (charbon, chaux, ciment). La connexion du réseau de tramway aux installations portuaires était effective en 1906, de même qu’un raccordement au Chemins de Fer Sud-France par la ligne 8 au passage à niveau Gambetta, lui aussi établi à voie métrique. La mise en service devait attendre 3 ans car l’Etat, propriétaire du port, ne voulait pas laisser la main à la Chambre de Commerce et d’Industrie, et confia aux TNL la desserte entre la gare SF et le port. Quant au PLM, il continuait de refuser toute connexion à son réseau…

Le tramway à la conquête de l’arrière-pays

Après avoir pris possession des rues des principales villes azuréennes et de la corniche, le tramway devait ensuite partir à la conquête de l’arrière-pays. Le Département des Alpes-Maritimes déclarait d’utilité publique le 10 décembre 1906 un réseau de 14 lignes dont 7 confiées aux TNL et 7 aux Chemins de Fer Sud-France, ces derniers fondant les Tramways des Alpes-Maritimes.

La première ligne ouvrait dès le 7 décembre 1907 en direction de Saint Jean Cap Ferrat contribuant au succès touristique de la localité. Il ne s’agissait que d’une courte ligne de 2 km. L’année suivante ouvrait la ligne de Levens, longue de 22,8 km, mise en service le 15 juin 1908 et prolongée par la suite jusqu’au centre du village, à un rythme cependant ralenti par la guerre. De faible trafic, la desserte de Levens ne comprenait que 3 services par jour, complétés de services partiels. Enfin, une ligne de 9 km ouvrait le 1er février 1909 entre Antibes et Cagnes sur mer : si elle croisait les tramways de Cannes, aucune connexion n’était assurée. Desservie toutes les heures, la ligne était renforcée par des services partiels entre la gare et le cap d’Antibes afin de proposer un service cadencé aux 20 minutes.

CP-nice-levens

Cette vue d'un tramway arrivant au terminus de Levens permet d'illustrer les compositions avec deux motrices en couplage, mais une seule des deux reliée au réseau électrique.

De son côté, la ligne de Contes était prolongée à Bendejun : ces 3 km ouverts également le 1er février 1909 ne connaissaient qu’une très faible fréquentation.

Deux autres lignes furent mis en chantier: la première en embranchement sur la ligne de Contes,  vers la Grave de Peille, ouverte le 12 juin 1911. De très faible potentiel, elle n’assurait que 2 liaisons par jour avec Nice. Enfin, une infrastructure fut construite en vue de rejoindre L’Escarène mais la raréfaction de la main d’œuvre du fait de la guerre dut interrompre les travaux qui ne reprirent pas à la fin des hostilités : en 1928, une route était ouverte à la circulation à la place du tramway.

CP-nice-la-grave

La ligne de La Grave de Peille bénéficiait des rares motrices à bogies, qui s'avéraient inadaptées à la ligne du littoral. A l'époque, le tramway était un outil du progrès et on n'hésitait pas à prendre la pose !

La ligne de Menton à Sospel devait constituer le point d’orgue du réseau des TNL car elle incluait de nombreux ouvrages d’art (tunnels et viaducs) pour compenser la topographie difficile de l’itinéraire, qui comprenait de nombreuses rampes de 65 ‰. Il ne fallut que 2 ans pour réaliser les 17,3 km de la ligne. Elle proposait 4 services par jour et un important trafic de marchandises.

CP-sospel-caramel

Pour rejoindre Sospel, le tramway devait affronter un itinéraire montagneux et les concepteurs de la ligne ont eu recours à plusieurs ouvrages d'art, dont un tunnel et le célèbre viaduc de Caramel destiné à élargir pour le tramway un lacet de la route. On notera que la motrice tracte deux remorques et doit être à la peine sur cet itinéraire qui comportait des rampes de 65 . Aujourd'hui, le viaduc est toujours présent, mais le tramway a disparu depuis plus de 80 ans...

CP-nice-caramel

Une autre vue du viaduc avec cette fois une charge plus modeste - et à la descente - pour le tramway, qui tracte un wagon destiné à acheminer à Nice les productions maraîchères de l'arrière-pays.

Le matériel roulant restait jusqu’à présent sur truck à essieux. De 1910 à 1912, une série de 16 motrices à bogies de 55 places, longues de 11,8 m, fut réceptionnée : ce matériel puissant disposait de 4 moteurs de 162 chevaux. Pour la ligne de Sospel, 4 motrices de 240 chevaux étaient acquises ainsi que 5 fourgons électriques pour les convois de marchandises. Le parc total comptait 174 motrices, 93 remorques, 13 tracteurs et 140 wagons de marchandises.

Pendant ce temps, sur le réseau urbain, les dernières infrastructures du programme initial n’avaient toujours pas été réalisées et boquaient toujours sur l’hostilité des riverains. Par deux fois, le cahier des charges fut amendé, avant que la guerre ne mette temporairement fin aux débats. Néanmoins, le trafic avait fortement augmenté puisqu’il atteignait 24,4 millions de voyageurs en 1912 contre 19,2 seulement 4 ans plus tôt. L’année 1912 marquait aussi la fin de l’extension du réseau, qui atteignant 166 km. Le réseau était largement bénéficiaire (4,5 MF de recettes pour 3,2 MF de charges) ce qui provoquait la colère des élus niçois contre les TNL dont on reprochait la qualité  très moyenne du service.

Durant la première guerre mondiale, l’heure était plutôt à la création d’embranchements militaires et à la mobilisation du personnel pour l’industrie. Entre autres, le réseau parvint à obtenir un raccordement au PLM à la gare Saint Roch et la connexion avec les tramways de Cannes dans les rues d’Antibes.

Le trafic diminuait, notamment celui des touristes. L’état des voies se dégradait, notamment sur la ligne de Monte Carlo. Des études furent entreprises pour modifier le tracé de certaines courbes afin d’admettre des motrices à bogies sur la ligne, moyennant le rétablissement de quelques sections de voie unique. Ces travaux furent achevés le 3 septembre 1918.

Modernisation et emprise du groupe Mariage

Au sortir de la guerre, le réseau avait besoin d’une modernisation en profondeur des installations. Il fallut attendre 1924 pour que les autorités concèdent aux TNL l’autorisation d’augmenter les tarifs en introduisant un sectionnement des lignes. Il fallut aussi procéder à l’allègement du service.

CP-nice-victoire

Sur l'avenue de la Victoire, le tramway devait composer avec l'animation de la ville, et sur cette carte postale, tous les moyens de transport sont présents : le vélo, le fiacre, l'automobile et le tramway. Notez la disposition de l'accès sur les motrices primitives avant leur vestibulage.

Un programme de rénovation fut engagé : les TNL souhaitaient augmenter l’empattement des trucks des motrices T de 1900, vestibuler les plateformes, généraliser les banquettes transversales et le frein à air. Toutes ces opérations furent réalisées… mais aucune motrice ne bénéficia de l’ensemble de ces améliorations si bien que le parc devait comprendre 10 variantes « nouvelles » pour une seule à l’origine ! Les train-controls furent transformés en convois motrice + remorque avec un empattement porté à 3 mètres pour allonger d’autant les motrices, mais l’opération se limitait finalement à 6 trains.

Il faut également signaler l’étude en 1921 de la mise en souterrain des tramways dans la traversée de Monaco, qui aurait été conçue pour accueillir à terme les trains du SF.

Autre évolution du service, la numérotation par secteurs fut adoptée le 1er janvier 1923, supprimant la différenciation par code couleur :

  • Réseau urbain de Nice : 1 à 15
  • Réseau du littoral Est : 20 à 25
  • Réseau de l’arrière-pays : 26 à 30
  • Réseau du littoral Ouest : 31 à 40
  • Réseaux de Monaco et Menton : 41 à 46

Pour accélérer le service et réduire les coûts d’exploitation, un système d’arrêts fixes et facultatifs était instauré.

Toujours pour rationaliser les dépenses, le 1er octobre 1921 apparaissaient les premiers autobus exploités par la Société Anonyme Niçoise de Transports Automobiles, afin de desservir des villages éloignés pour lesquels on avait renoncé au tramway. Les TNL suivaient de près et proposait l’autobus pour exploiter les lignes toujours problématiques pour les riverains du centre-ville. 10 Schneider type H similaires aux autobus parisiens, mais montés sur pneumatiques, arrivaient dès 1925. Suivaient 3 autobus Somua MATZ.

Les TNL décidaient tout de même de construire une nouvelle série de tramways fortement inspirée du type L parisien, et évidemment adapté à la voie métrique. Rien de plus étonnant puisque le groupe Mariage était en position forte tant aux TNL qu’à la STCRP. La commande portait sur 8 trains motrice + remorque, réversibles, avec une puissance de 200 chevaux. L’empattement de 3,60 m posait problème sur plusieurs lignes et cantonnait ces élégantes rames aux axes rectilignes.

CP-nice-massena-2

La place Masséna avec au premier plan un convoi type L dont la parenté parisienne est manifeste et en arrière-plan le terminus aux voies abondamment garnies. La vue vers la mer n'est pas encore dégagée par les opérations d'urbanisme.

 Parallèlement, 50 motrices furent reconstruites pour être exploitées avec un unique agent. Malheureusement, l’autorisation de la ville pour ce type de service ne fut jamais donné, donnant un rude coup aux TNL qui devaient maintenir 3 agents sur des trains motrice + remorque au lieu de 2 dans ce projet. Les TNL proposaient de moderniser 49 trains pour former des convois réversibles mais finalement, faute de moyens, et du fait d’un lobbying anti-tramway grandissant, seules 7 trains furent constitués.

Un démantèlement savamment orchestré mais retardé par la guerre

Néanmoins, le tramway n’était pas encore banni de la ville, même s’il n’était depuis ses origines pas à l’abri des critiques d’une partie de la population. Voici maintenant que le lobby automobile affinait ses attaques contre le tramway. La concurrence était de plus en plus sévère avec l’essor du trafic routier sur le littoral, et le retrait des motrices à bogies sur la corniche n’arrangeait rien, en dégradant le confort. La campagne de presse atteignait des sommets de désinformation, et parfois de bêtises, quand le tramway était jugé dangereux pour la vie des touristes et des automobilistes. En 1927, André Mariage prend la présidence des TNL et de la STCRP, amplifiant l’hostilité à l’égard du tramway. L’élection de Jean Médecin à la tête de la municipalité, virulent opposant au tramway accusé d’être le symbole du passé, accroît encore le discours anti-tramway à Nice. Pourtant, l’autobus peinait à trouver sa clientèle.

Autres difficultés, d’ordre économique cette fois, l’extension de la ville n’avait pas été suivie d’une évolution du périmètre du réseau urbain. Un nouveau partage s’imposait mais il entrainait une dégradation de l’équilibre budgétaire des TNL, d’autant que le trafic de marchandises était fortement concurrencé par l’amélioration des poids lourds.

La suppression des tramways débutait dès 1929 et en 1932, l’intégralité des lignes du littoral avait disparu, y compris le réseau urbain de Monaco. Pendant ce temps, le plan de voies du réseau urbain était modifié pour éliminer les tramways de l’avenue de la gare et de la place Masséna, opération achevée le 5 juin 1931. Trois ans plus tard, la restructuration du réseau diminuait la présence du tramway en centre-ville, mais les riverains se plaignaient cette fois-ci non plus des grincements du tramway mais du bruit et des fumées provoquées par les autobus qui leur succédaient !

Il ne restait que 4 lignes en 1938 :

  • 3 : Abattoirs – Trinité Victor
  • 9 : Port – Saint Augustin
  • 22 : Gare PLM – Carras
  • 35 : Rue de l’hôtel des postes - Cimiez

Au déclenchement de la guerre, le réseau fut pris au dépourvu puisque la pénurie de carburant qui s’installait et la réquisition des autobus entraînait un retour progressif des tramways sur 3 lignes, donc celles du boulevard Pasteur, de Riquier et de Contes (incluant l’antenne de La Grave de Peille), dans des conditions particulièrement précaires. Il fallait restaurer des raccordements déposés à la hâte et moderniser avec des moyens limités 9 motrices pour continuer d’assurer un service minimal sur le réseau urbain avec un effectif total de 48 motrices et 22 remorques.

En avril 1942, l’exploitation par trolleybus de la ligne de Cimiez préfigurait le développement de ce mode de transport qui composait avec le manque de matière première et de carburant. Les TNL commandaient 3 types de véhicules : CS60, VBB et remorques Scemia.

Au sortir de la guerre, la situation du réseau est des plus précaire puisque le réseau de tramway, entretenu a minima, nécessite de lourds investissements et les moyens manquent. Les TNL décident de l’abandonner au profit du trolleybus et de l’autobus.

La suppression des lignes sera assurée méthodiquement, par secteurs, en liaison avec l’installation des bifilaires le cas échéant et l’arrivée des nouveaux véhicules. Au 1er janvier 1950, ne subistaient que les lignes 3/36 Madeleine – Trinité, 6 Abattoirs – Passage à niveau, 7 Riquier – Passage à niveau, 9 barré Port – Carras et 37 Place Garibaldi – Contes. Cette dernière tombait une semaine plus tard et le trafic marchandises cessait le 8 mai 1950. Le 9 barré était déjà doublé par des lignes de bus, et disparaissait le 5 novembre 1951.

1949_08_nice_schnabel_ligne3-36

Nice - Ligne de La Madeleine - 1949 - La motrice 123 et une remorque d'allure bien désuète symbolisent la fin du tramway à Nice. La motrice vestibulée cache à peine son âge. L'indice de ligne n'est même plus présenté à l'avant. © Ch. Schnabel

Ne restait plus que la ligne 7 Passage à Niveau – Riquier en date du 13 mai 1952. Le 10 janvier 1953, le dernier tramway rentrait au dépôt, victime d’une conception très automobile du progrès. Les receveurs des TNL avaient affiché sur les 7 dernières motrices une affiche  « Pendant qu’il en est encore temps, utilisez les tramways : dans x jours il n’y en aura plus ». La presse titrait « Place au progrès ». Quant au dernier tramway de marchandises, il circula le 30 décembre suivant.

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Nice - Rue Gioffredo - janvier 1953 - Sur les vitres latérales, une affiche annonce la fin imminente (ici 7 jours) de l'exploitation des tramways. on notera le vestibulage de la motrice avec une allure atypique : les versions s'étaient succédées avec plus ou moins d'élégance dans les transformations des années 1920...  © Ch. Schnabel

Vers le nouveau tramway de Nice (depuis 2007)

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