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transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Les tramways de Nice : avant l'électrification

 Apparition des transports en commun à Nice

Le comté de Nice développait une économie portuaire d’importance moyenne par rapport au voisin génois, et son urbanisation, coincée entre la mer et la montagne, supposait une certaine densité d’urbanisation. La ville, de taille encore modeste, bénéficiait à partir de 1835 d’un service de diligence entre le centre de la cité et le pont du Var, qui marquait alors la frontière avec la France, financé par M. Legrand, un hôtelier de la ville. L’un de ses concurrents, M. Laupias, proposait en 1845 deux services à fréquence d’une heure entre Cagnes sur mer et la place Saint Dominique, ainsi qu’entre le Paillon et le faubourg du Ray.

Le rattachement à la France en 1860, l’arrivée du chemin de fer en 1864 et les premiers séjours touristiques d’une clientèle aisée souvent rentière firent de Nice une destination privilégiée. Parallèlement, la ville grandissait, au nord du Paillon, et les plans d’urbanisme adoptaient une trame de voiries perpendiculaires mais de largeur assez modeste, cependant suffisante pour favoriser la circulation des omnibus hippomobiles.

La même famille Laupias étaient à l’origine de l’Entreprise générale des omnibus de la Ville et des Chemins de fer mettant en place deux nouvelles lignes, entre la gare du PLM au port et entre la place Charles-Albert et le quartier Saint Barthélémy.

Cependant, les 4 lignes eurent finalement une existence éphémère puisqu’on commençait à parler du tramway, mais en lointain écho de la dynamique des villes industrielles situées plus au nord. Plusieurs tentatives échouèrent, y compris un réseau à air comprimé, 4 ans avant le projet nantais. La Société Financière de Paris fait adopter un projet le 22 juillet 1875 déclaré d’utilité publique deux mois plus tard. La concession était accordée par l’Etat, qui la rétrocédait à la Ville de Nice qui, à son tour, la confiait à la Société.

Un réseau de 4 lignes était établi en direction de Californie, Auberge Cotto et des Abattoirs au départ de la place Masséna ainsi que de la gare PLM à Port Lympia. Long de 11,9 km, ce réseau était établi à voie normale. La mise en service s’étalait de mars 1878 à juillet 1880.

Cependant, le 4 septembre 1879, la Compagnie Générale des Omnibus de Marseille se substituait à l’exploitant primitif, avant de faire faillite en 1883. Il fallait attendre 4 ans pour que la situation soit clarifiée avec la création de la Société Nouvelle des Tramways de Nice, appuyée par des capitaux belges, le 28 février 1887.

L’essor démographique et touristique de la Côte d’Azur bénéficiait tout particulièrement à Nice : le service des tramways hippomobiles devenait à la fois trop lent et de périmètre trop restreint. Le PLM ne pouvait satisfaire à la demande de transport qui augmentait avec le développement de la ville, laissant le champ libre pour de nouvelles propositions de lignes de tramways dont le réseau se limitait encore à 11,9 km. Il était exploité avec 41 remorques d’hiver et 24 voitures d’été de type baladeuses.

CP-nice-victoire

Nice disposant d'un climat favorable, les baladeuses connaissaient un franc succès. Ces deux motrices se croisent alors que le trafic automobile pointe son nez. Les tramways portent désormais un indice de ligne sur une plaque carrée, ce qui permet de dater cette carte postale.

CP-nice-massena

La place Masséna était le point névralgique du réseau et avait été muni en 1901 d'un vaste kiosque servant à la fois de salle d'attentes et de bureau de vente de tickets. Le tramway passe aujourd'hui approximativement au même endroit.

Cimiez : apparition du premier tramway électrique

Sur la colline de Cimiez avait été établi un casino, un parc zoologique et une salle de spectacle, à proximité des arènes romaines. Les propriétaires du site demandaient en 1890 la concession d’un tramway à vapeur depuis la gare, qui devait traverser les arènes : concession refusée par la ville du fait du préjudice aux arènes et de l’opposition des riverains à la vapeur. Qu’importe, la ligne serait électrique et ses promoteurs fondaient la Compagnie anonyme des Tramways électriques de Nice-Cimiez obtenant la concession le 2 janvier 1895, qui avait racheté les motrices à accumulateurs et voie de 0,60 m d’une exposition technique tenue à Lyon en 1894.  

Officieusement mise en service le 27 février 1895, le service fut interrompu dès le 10 mars pour cause d’incendie de l’usine électrique. Reprenant le 20 juin, elle fut arrêtée à nouveau le 12 juillet : le Préfet n’avait pas déclaré la ligne d’utilité publique ! Ce fut chose faite le 22 novembre et l’inauguration officielle eut lieu le 25.

La ligne longue de 3,9 km comprenait des rampes de 70 pour mille qui malmenaient les 8 voitures, surnommées Pagodes, exploitées en hiver avec 6 liaisons quotidiennes et toutes les 30 min à la belle saison. Les arrêts étaient sur demande, sauf dans les rampes, car les petites motrices n’étaient munis que d’un moteur de 8 chevaux ! Elles avaient dû être raccourcies afin de pouvoir s’inscrire sur les plaques tournantes des terminus, raccourcissant à 2,18 m l’empattement initial de 3,60 m. Elles ne proposaient que 32 places. Elles furent rapidement munies de 2 moteurs de 50 chevaux pour améliorer leurs performances, mais les niçois les surnommmaient « limaces ».

Le tramway de Cimiez fut repris par les TNL alors en cours de constitution suite à la faillite de l’un des propriétaires de la compagnie. L’électrification par fil aérien était décidée, tout comme l’intégration au réseau à voie métrique. Les travaux se déroulaient au cours de l’année 1899 et la ligne était remise en exploitation le 13 janvier 1900.  

Vers la constitution d’un réseau suburbain

Le besoin se manifestait aussi sur le littoral, parallèlement à la voie ferrée du PLM, ce qui engendrait plusieurs conflits avec la compagnie. L’aménagement de la route de la corniche entre 1870 et 1882 suscitait rapidement des projets de chemin de fer d’intérêt local, d’abord à vapeur puis électriques, mais avec plus ou moins de sérieux jusqu’à ce que la Société Nouvelles des Tramways de Nice s’intéresse au sujet en mars 1889 en proposant l’établissement d’une ligne entre Menton et La Bocca soit 82,6 km, en traction vapeur, à écartement métrique. Manifestant son opposition, le PLM recevait une demande du Conseil Général d’une amélioration de la desserte omnibus, et ne faisait aucune proposition alternative.

CP-chemin-de-fer-monaco

Les chemins de fer du PLM voyaient d'un mauvais oeil l'arrivée du tramway du littoral qui les privaient - selon eux - d'un trafic touristique abondant. Pourtant, la compagnie était plutôt chiche quant au nombre de trains omnibus engagés sur la ligne Marseille - Vintimille, préférant les rapides et express plus prestigieux. Elle ne se priva pas de retarder le projet de tramway interurbain !

Pour esquiver la position de la ville de Cannes, le terminus était reporté à l’entrée est de la ville en août 1893. Restait l’avis de la principauté de Monaco, qui devait temporiser le projet jusqu’à ce que ne soit à son tour développée l’étude d’une première ligne urbaine.

La SNTN devenait les Tramways de Nice et du Littoral le 2 avril 1897, obtenant la concession d’une ligne Cagnes – Menton le 9 septembre suivant, sur 46 km, incluant la traversée de Monaco et un embranchement sur Contes de 16 km.

La concession du réseau électrique de tramways à écartement métrique était officialisée le 10 mars 1902, soit 3 ans après le début des travaux.

CP-nice-corniche

La route de la corniche telle qu'on a du mal à l'imaginer aujourd'hui. Le tramway, malgré un gabarit limité à 1,90 m, occupe assez largement la voirie, ce qui ne manquera pas de lui attirer bien des critiques de la part de touristes fortunés disposant d'une automobile.

Monaco : de la constitution à l’intégration

Les premiers projets de tramways dans la Principauté remontaient à 1895, notamment à l’initiative de la Société des Bains de Mer ou de Thomson-Houston porté localement par M. Crovetto. Le projet était approuvé le 24 janvier 1897 par le Prince Albert Ier avec la fondation de la Compagnie des Tramways de Monaco gérant la construction et l’exploitation de 5 lignes totalisant 8,2 km, mises en service entre le 14 avril 1898 et le 3 mai 1900 :

  • Gare PLM – Saint Roman
  • Place d’Armes – Place du Palais
  • Gare de Monte-Carlo – Casino
  • Place d’Armes – Fontvieille
  • Boulevard Charles III – Boulevard des Moulins

Il adoptait la traction électrique avec plots Thomson. La rampe de 9,3% sur le boulevard de la Condamine constituait une difficulté majeure pour les 9 motrices sur truck Brill équipées de 2 moteurs General Electric de 42 chevaux et controller Thomson-Houston. L’inauguration du réseau urbain avait lieu le 14 mai 1898 sur une première liaison Place d’Armes – Saint Roman, reprenant les tracé des deux premières lignes concédées, malgré plusieurs accidents dans la rampe de Condamine (93 pour mille au point le plus difficile) pendant les essais.

CP-monaco-casino

Sur cette vue aérienne du casino de Monte-Carlo, deux convois de tramways sont visibles dont un entame la descente de la Condamine (à gauche du cliché). Les motrices sont alimentées par fil aérien après l'abandon du plot Thomson-Houston d'une fiabilité aléatoire.

Le 11 mars 1899, une deuxième section entre la gare de Monaco et la place de la Visitation ouvrait et la ligne du Casino de Monte-Carlo le 3 avril 1900. Le réseau se limitait à 5,1 km. La ligne de Fontvieille ne fut réalisée qu’après l’intégration au réseau des TNL. Comme à Cimiez, les arrêts étaient réalisés à la demande, sauf sur les sections en forte pente.

Les trois lignes devaient toutefois être modifiées par les TNL dès 1903 qui s’empressait d’installer le fil aérien pour éliminer des plots au fonctionnement capricieux, occasionnant de nombreux arcs électriques, des électrocutions de chevaux et l’interruption des communications téléphoniques au passage du tram ! Le 18 août 1909, les TM cédaient définitivement l’exploitation du réseau aux TNL, mettant fin à 6 années de co-exploitation.

Chapitre suivant : de l'apogée au déclin

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