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transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Les tramways de Turin (2) : 1945-1982

Des incertitudes mais un réseau dans un premier temps préservé

Après la guerre, durant laquelle le réseau fut fortement endommagé par les bombardements, et en dépit de la croissance démographie et de l’explosion industrielle de Turin dominée par Fiat, le réseau perdit 5 lignes dans la décennie 1950. La reconstitution du parc se révéla difficile car sur les 616 voitures (motrices et remorques) en service en 1940, il n’en restait que 260 en état de circuler : 69 avaient été détruites et 287 fortement endommagées. Les dépôts étaient aussi pour la plupart inutilisables. La remise en état des voies avait été quasiment l’opération la plus rapide, et il fallut tout de même commander du matériel neuf car, à court terme, le tramway restait essentiel à la vie quotidienne.

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Turin - Piazza Carducci - Fin des années 1940 - Peu de circulation... mais un défilé intéressant de tramways, essentiellement avec des Peter Witt, dont on remarque la disposition des portes en 2-4-4, alors que les milanaises étaient en 4-4-4. Une des premières motrices SEAC participe au carrousel.

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Turin - Corso Regina Margherita - Avril 1977 - La motrice SEAC n°3002 fait partie d'un petit lot de 6 unités livrées en 1942-1943, précédant une commande massive de 130 unités réceptionnées de 1949 à 1958. Après la remise en état, le réseau bénéficia donc d'investissements destinés à le pérenniser... au moins en partie. © T. Boric

Cependant, une commission d’études s’était penchée sur la modernisation du réseau urbain et l’évolution du plan de circulation avec la mise à sens unique de certains axes, impactant peu le réseau de tramways : celui-ci fut d’abord victime de considérations budgétaires, tant face au déficit de certaines lignes qu’aux investissements à consentir pour les moderniser durablement.

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Turin - Via Antonio Cecci - Dans les années 1950 - Autre signe d'amélioration du réseau, la création de quelques refuges pour les voyageurs avec des abris en béton armé. Une motrice série 3100 fraichement réceptionnée circule dans une rue où les automobiles (une majorité de Fiat, évidemment...) commencent à se faire de plus en plus nombreuses.

Les autobus remplacèrent les tramways interurbains par étapes successives entre 1949 et 1958. Seule exception, la ligne de Rivoli, où l'axe fut certes transformé en autoroute urbaine, mais en maintenant un service de transport en commun avec trolleybus.

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Rivoli - 1958 - Les trolleybus articulés Fiat-Viberti ont été engagés sur la liaison Turin - Rivoli, arborant une livrée rouge et crème distincte du réseau urbain à dominante verte. Bien que proche de Turin et rattrapée par l'urbanisation en périphérie, amorcée dans les années 1950, Rivoli n'était pas desservie par le réseau turinois mais par un service spécifique.

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Turin - Via Vittorio Venetto - 1973 - La ligne interurbaine de Chieri fut exploitée à à partir de 1951 à l'aide de 11 petits trolleybus Fiat carrossés par Viberti, revêtus de 2 tons de bleu, et présentant la particularité d'avoir leur poste de conduite en position centrale. La ligne disparut en 1979. ©

L'arrivée des motrices articulées : une modernisation économique

En revanche, l’exploitation du réseau profitait de l’introduction des premières motrices articulées, augmentant la capacité et réduisant les coûts d’exploitation (un receveur de moins par rapport aux convois motrice + remorque). Le « bambino-boom » italien et l'exode rural étaient particulièrement soutenus : dans la seule décennie 1950, la population de Turin augmentait de 50%, passant de 710 000 à 1,1 millons d'habitants. La fréquentation des transports en commun augmentait malgré l'essor de l'automobile : il fallait donc parer au mieux aux besoins, en dépit de moyens relativement limités. L'ATM engagea une modernisation par transformation du matériel existant.

Pour commencer, l'usine de Savigliano constitua 72 rames type « deux pièces – cuisine » (« two pieces and the bath » pour les anglais) entre 1951 et 1959 à l'aide de motrices des années 1930. Ensuite, SEAC transforma 116 des 117 Peter Witt pour former des rames articulées reposant sur 3 bogies.

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Turin - Via XX Settembre - 1972 - La version turinoise du « deux pièces– cuisine », d'apparence moderne ne peut faire oublier que ces rames reposent sur des trucks à essieux d'avant-guerre. Elles ont immédiatement été critiquées pour leur inconfort et leur roulement très bruyant. © J.H. Manara

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Turin - Via Vittorio Venetto - 1973 - Les Peter Witt après transformation contrastaient avec les 2700 pourtant à peine plus anciennes de conception, confirmant la supériorité de ces motrices de conception américaine avec bogie Pennsylvania. A cette époque, cette belle place est de plus en plus occupée par la voiture. © J.H. Manara

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Turin - Via Vittorio Venetto - 1973 - En guise de matériel neuf, livré entre 1949 et 1958, les 130 unités de la série 3100 étaient en quelque sorte les cousines italiennes de la série 1000 de Madrid. Si l'allure générale présente des similitudes avec les PCC bruxelloises, sur le plan technique, il s'agit de motrices de conception technique assez traditionnelle, mais avec des bogies de facture correcte. © J.H. Manara

La croissance du trafic automobile, au fur et à mesure de la commercialisation - par Fiat évidemment - de modèles de plus en plus accessibles - menaça les tramways, qui, à la faveur de la restructuration de 1966, perdait la totalité des dessertes franchissant le Pô. Les 13 lignes maintenues assuraient encore un quadrillage correct de l’agglomération, principalement établie sur la rive gauche du fait de la topographie de la rive droite.

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Turin - Piazza Porta Palazzo - Avril 1977 - Le tramway s'engage sur la courbe et l'automobile devra le laisser passer. Notez que tous les matériels arrivés à partir des Peter Witt disposaient d'une girouette frontale. Sur sur cliché, elle n'indique plus rien, comme sur les autobus de l'époque, constituant une régression importante faisant des transports en commun une affaire d'initiés. © T. Boric

Les années 1970 furent un peu moins difficiles et la consistance du réseau fut à peu près stabilisée. Cependant, l'exploitation devait composer avec un matériel au mieux à mi-vie et quinquagénaire pour le plus ancien. Point remarquable, les voies de la via Garibaldi furent abandonnées en 1979 lors de la piétonisation de cette artère très commerçante.

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Turin - Corso Vittorio Emanuele II - 1978 - Une motrice 3100 rénovée, avec modification de la face avant, adoption du self-service et la livrée unifiée orange, destinée à améliorer la visibilité des transports en commun, avec cette couleur alors en vogue. Avec la rénovation, les 3100 ont perdu leur girouette directionnelle. © J.H. Manara

La fin des trolleybus

Le développement du trolleybus fut assez modeste : des lignes interurbaines furent créées vers Chieri en 1951 et Rivoli en 1955. Leur existence fut néanmoins assez éphémère : le réseau urbain a été restructuré en 1975 et limité à 3 lignes : 33 Via Paolo Sacchi – Aeronautica, 34 Largo Tocana – Bengasi et 35 Lingotto – Nichelino avec une antenne vers le corso Spezia. Ces services furent convertis à l’autobus entre 1975 et 1980, y compris les lignes interurbaines reprises par les autobus en 1979.

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Turin - Via Nizza - 1973 - Les lignes 34 et 35 desservaient le sud-est de la ville, en direction du Lingotto, avec des constructions de l'après-guerre. Les trolleybus ont toujours joué un rôle marginal dans l'histoire des transports en commun turinois. Sur ces deux clichés, on voit très distinctement que ces véhicules avaient la conduite à droite, tout en circulant à droite de la chaussée. Une influence anglaise ? © J.H. Manara

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Turin - Corso Vittorio Emanuele II - 1972 - Les années d'après-guerre ont surtout été celles des autobus. Si les tramways étaient verts, les véhciules routiers portaient une livrée rouge et crème d'un bel effet. L'esthétique des véhicules était assez particulière, avec un pare-brise en 3 parties destiné à améliorer la visibilité à l'avant, ne serait-ce qu'en raison d'une circulation de plus en plus intense. Les autobus à impériale avaient une présence attirant l'oeil... et les publicitaires en profitaient ! © J.H. Manara

Suite du dossier : les tramways depuis 1982

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