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transporturbain - Le webmagazine des transports urbains

Les tramways de Turin (1) : 1871-1945

Compte tenu du caractère aléatoire de son exploitation comme rappelé en introduction de ce dossier, il est assez difficile de chiffrer précisément la longueur du réseau des tramways turinois. Il est donc fait mention officiellement de 88,5 km et de 9 lignes, desservant 187 arrêts. En réalité, 58 km sont réellement exploités en service commercial.

Le plus ancien réseau italien

Les transports en commun sont apparus à Turin dès 1845, évidemment au moyen d’omnibus hippomobiles.

Les premiers tramways, toujours à traction animale, furent implantés dans la ville à compter de 1871. La Société Belge Turinoise de Tramways (SBT) avait obtenu une première concession portant sur 9 lignes.

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Turin - Piazza dello Statuto - Vers 1880 -  La voiture primitive ouverte est légère et le profil des premières lignes est facile, ne nécessitant qu'un unique cheval pour en assurer la traction.

CP-tram-hippo-ponte-vittorio-emanuele-I

Turin - Corso Casale - 1890 - L'église de la Gran Madre est un point d'observation des tramways turinois, qui a quelque peu perdu de sa splendeur. Le plan de voies n'est pas encore définitif, comme on le verra sur d'autres clichés.

Comme partout ailleurs, le succès des premières lignes motiva de nouveaux investisseurs et la Société Turinoise des Tramways et Chemins de fer Economiques (STT) développa 3 autres lignes avant que ne soient engagées les discussions précédant la fusion de ces entreprises dans un but d’unification technique et commerciale du réseau. Néanmoins, la ville accordait au même moment une nouvelle concession à la Société Anonyme d’Electricité de Haute Italie (SAEAI), qui était au demeurant le premier distributeur des productions de Siemens dans le jeune royaume. Naturellement, ces nouvelles lignes inauguraient la traction électrique, alors que les autres avaient eu recours essentiellement à la vapeur, avant de débattre sur les modalités d’adoption de l’énergie nouvelle, entre ligne aérienne et accumulateurs. Sans surprise, la première solution l’emporta.

La création de lignes interurbaines

Turin devint aussi le terminus de plusieurs lignes interurbaines, fruit d’un débat assez long entre les partisans du chemin de fer conventionnel et d’un système économique, établi généralement en voirie et parfois sur des sections propres, éventuellement avec un gabarit et un écartement réduit.

A leur apogée, plus de 130 km étaient exploités en 4 ensembles. La première ligne ouvrit en 1875 en direction de Moncalieri, prolongée à Poirino (à 25 km de Turin) en 1881, année de mise en service de la première section d’un vaste ensemble en direction d’Orbassano, Piassasco, Giaverno, rapidement réalisé puisque achevé en 1883. Une antenne atteignait Pinerolo en 1899, selon un tracé globalement parallèle à la voie ferrée. Entre temps, un troisième ensemble était mis en service en 1887 entre Turin, Gassino, Chiavasso et Brusasco. D’une longueur de 37 km, il était, comme les autres, assuré en traction animale, avant de passer à la traction mécanique en 1880. Seul le dernier réseau, en direction de Settimo adoptait d’emblée la traction mécanique.

Electrification du réseau et unification de l’exploitation

En 1901, l’exploitation du réseau introduisit le principe des arrêts fixes pour assurer la régulation du trafic et assurer notamment les principales correspondances.

Après avoir encouragé diverses entreprises à l’exploitation du réseau, la ville amorça en novembre 1906 un renversement de politique avec la municipalisation de la SAEAI et la fondation de l’Agence des Tramways Municipaux le 1er octobre 1907. L’extension du réseau put alors continuer, avec l’acquisition de 100 motrices et 40 remorques et la construction d’un premier nouveau dépôt puis d’un second en 1922.

CP-tram-emanuele-filiberto

Dans les années 1920, ce croisement entre deux motrices électriques à plateformes ouvertes, dont l'une tracte une remorque baladeuse, montre qu'à cette époque, les tramways roulaient à gauche. 

L’unification prit progressivement forme dans les années 1920 avec l’absorption des lignes SBT et STT. Le processus fut achevé en 1928, avec un réseau comptant 144 km d’infrastructures. Les services bénéficièrent d’une numérotation logique intégrée tandis que le matériel adoptait la livrée rouge et crème de l’ATM en lieu et place du vert de la SBT et de la STT. Ce fut aussi l’occasion de réexaminer certains plans de voies sur les grands carrefours et de réorganiser une partie des itinéraires pour essayer de fluidifier ces principaux nœuds. Un troisième dépôt avait été inclus dans ce programme, ouvert en 1928.

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Dans les années 1930 probablement, devant la gare de Porta Nuova, sur le corso Vittorio Emanuele II, le défilé des tramways était intense : plusieurs motrices à 2 essieux sont visibles sur cette carte postale mais on aperçoit aussi à hauteur de l'automobile une Peter Witt.

Parallèlement, Turin réceptionnait de 1930 à 1938 pas moins de 217 motrices de grande capacité type Peter Witt, avec quelques différences par rapport au modèle milanais : porte à 2 vantaux à l'arrière (4 à Milan) et 2 ou 4 moteurs selon les séries. L'ATM avait aussi transformé 45 motrices à essieux en les dotant d'une caisse plus moderne comparable aux Peter Witt, mais de longueur plus réduite et à 2 portes.

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La Piazza Castello, vue probablement depuis l'un des immeubles faisant l'angle de la Via Pô, disposait à l'époque d'un riche plan de voies. Si les automobiles sont encore en nombre restreint, notez en bas à gauche une charette tirée par un cheval.

La gestion de la ligne de Sassi-Superga parachevait l’unification du réseau : le funiculaire de 1884 fut remplacé le 13 août 1932 par un tramway à crémaillère.

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Turin - Gare de Sassi - 1961 - Le tramway de Sassi-Superga constitue un isolat dans le réseau turinois, avec plusieurs particularités techniques, dont évidemment la crémaillère, mais aussi l'alimentation par 3ème rail latéral. © J.H. Manara

Le 28 janvier 1931, Turin inaugura une première ligne de trolleybus (ligne 52) entre Ponte del Gatto et Cavoretto sur 2100 m. L’extension demeura assez modeste avec seulement 12 km en 1940 pour 5 lignes principalement au sud de la ville, desservant notamment Mirafiori. Ces cinq lignes formaient en fait quatre branches en croix.

L’introduction des premiers trolleybus ne ralentit pas la croissance des tramways : en 1940, année de son extension maximale le réseau comptait 23 lignes et 192 km d’infrastructures. Un peu comme à Bruxelles, on pouvait alors dire que le tramway passait dans – presque ! – toutes les rues du centre de Turin.

Des lignes interurbaines modernisées mais menacées

L’électrification des lignes interurbaines débuta dès 1904 avec la ligne de Poirino. La ligne de Brusasco avait été rapidement convertie à la traction vapeur en 1880, non sans provoquer des contestations du fait des nuisances engendrées. L’électrification débuta en 1908 jusqu’à Chiavasso, la section vers Brusasco n’étant équipée qu’en 1931.

Le réseau du sud-ouest passa à la traction électrique en 1928, gagnant également une nouvelle antenne vers Sanatorio San Luigi à l’existence bien éphémère : elle avait porté à son apogée cet ensemble, comptant 57 km de ligne. Néanmoins, les dessertes de Pinerolo et de San Luigi furent promptement abandonnées, dès 1936.

La ligne de Settimo bénéficia de la traction électrique en 1924, avant d’être prolongée à Barca-Bertolla en 1927.

Les années 1930 furent mouvementées pour ces lignes car leur gestion fut profondément modifiée avec pour objectif de l’unifier sous l’égide de la SATTI (Société par Actions Turinoise de Transports Intercommunaux) Si certaines branches étaient abandonnées, d’autres connaissaient, grâce au renforcement du service, un net surcroît de fréquentation entre 1936 et 1938, de l’ordre de 40%.

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Turin - Corso Casale - Probablement à la fin des années 1920 - Au premier plan, un convoi de la ligne de Trofarello : la motrice repose sur 2 bogies et  dispose de 2 archets pour capter le courant. Plusieurs véhicules stationnent sur le pont en raison d'une parade militaire sur l'actuelle via Vittorio Venetto. Sur l'autre rive du Pô, on aperçoit une motrice et une remorque. Notez l'évolution du plan de voies par rapport au cliché plus haut dans cette page.

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Quatre illustrations de la modernisation des tramways interurbains autour de Turin avec, de haut en bas, la ligne de Brusasco (dans la traversée de Chivasso), le terminus de Giaveno, la traversée de Leumann par la ligne de Rivoli avec son extraordinaire automotrice Fiat d'une très grande longueur  (à la disparition du tramway, l'axe sera transformé en voie rapide) et enfin celle de Venaria Reale, terminant au pied du château (en piteux état, étant passé du statut de résidence de la Maison de Savoie à celui de bâtiment militaire après avoir été pillé par Napoléon Ier...).

Suite du dossier : la période 1945-1982

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