Rassurez-vous, il ne s'agit pas de faire une ligne de RER à la parisienne à l'échelle de la Métropole lyonnaise, mais plutôt d'une interconnexion Est Ouest Lyonnais Express. Bien trouvé non ?
Puisque les débats de la campagne électorale des élections municipales (et métropolitaines) mettent les transports en première ligne, essayons de poser sereinement quelques jalons. La focalisation sur le métro, avec une course à qui le prolongera le plus loin, passe à côté de plusieurs sujets bien réels et surtout de plusieurs opportunités. Parmi elles, la réelle problématique capacitaire sur T3 entre la gare de la Part-Dieu et Meyzieu, et le déficit d'offres performantes dans l'ouest de l'agglomération. Il est assez cocasse de remarquer que le projet de cinquième ligne de métro manque singulièrement de dimension métropolitaine en la cantonnant à une desserte interne à la ville de Lyon.
Dans ce contexte, nous avons présenté dans les colonnes de transporturbain un projet alternatif pour la desserte du Plateau Ouest comprenant 3 lignes de tramway, avec une section souterraine et trois branches vers la gare de La Demi-Lune, la gare d'Alaï et Sainte Foy, dans une logique de desserte relativement fine mais rapide depuis Perrache d'abord et ensuite la rive gauche, peut-être jusqu'à la Part-Dieu.
Nous le complétons par une proposition développée dans les colonnes de transportrail s'appuyant sur le réseau ferroviaire de l'Ouest Lyonnais, sous-utilisé malgré les investissements réalisés sur 2 des 3 branches qui le constituent. Ces infrastructures offrent un maillage relativement satisfaisant du territoire et - surtout - ne se cantonnent pas à la seule commune de Lyon en allant capter les trafics le plus en amont possible.
Or l'Ouest Lyonnais aboutit en cul-de-sac à la gare de Saint Paul, très proche du centre de Lyon mais assez mal connectée et imposant au moins une - sinon deux - correspondances pour atteindre la Part-Dieu.
L'hypothèse d'un tram-train en surface nous paraît aujourd'hui hors jeu. L'insertion urbaine dans la traversée de la presqu'île n'est pas évidente si on veut proposer un système de transport de grande capacité et à haut niveau de performance, et nous suggérons dès lors de réaliser un tunnel reliant l'Ouest Lyonnais à T3, avec la mise en cohérence d'infrastructures différentes : signalisation ferroviaire, 1500 V et gabarit 2,65 m d'un côté, marche à vue, 750 V et gabarit 2,40 m de l'autre.
Il s'agit donc de mixer une desserte urbaine rapide et à haut débit donc souterraine avec une irrigation fine en surface du plateau Ouest, et une desserte express de l'ouest et de l'Est de la Métropole. Dans l'esprit, un chemin de fer urbain léger comme on en connait en Allemagne dans une version lourde (à Cologne par exemple) ou au Portugal dans une version plus proche de l'école française du tramway, à Porto. On pourra aussi évoquer Rouen (avec des justifications discutables) et Nice (où la composante métropolitaine sinon suburbaine est en train d'émerger)
Ce tunnel pourrait être amorcé à l'extrémité de la gare Saint Paul, en conservant le tunnel de Loyasse, avec une pente de 7,5 à 8% (comme sur le tramway de Nice) jusqu'à la Saône. Il émergerait sur l'actuel T3 en aval de l'avenue Félix Faure pour s'isoler de T4 après avoir desservi la presqu'île et la rive gauche.
Lyon Saint Paul - 17 décembre 2018 - Sujet de premier plan dans notre réflexion : peut-on faire plonger le tunnel à la sortie de celui de Loyasse, sans avoir à le reprendre en sous-oeuvre ? Cela semble possible... mais cela mérite confirmation par une étude solide. © transporturbain
Le projet implique la sortie du réseau ferré national de l'Ouest Lyonnais et la mise en compatibilité des deux réseaux (alimentation, régime d'exploitation, signalisation). Quant au gabarit, soit les stations de l'actuel T3 sont adaptées poiur des trains larges de 2,65 m, soit le matériel est conçu pour un double gabarit, comme à Dresde par exemple.
Notre proposition de principe de tracé souterrain (en rouge), à affiner selon les contraintes du sous-sol, pour l'interconnexion Est - Ouest lyonnais. On rappelle aussi le scénario de base en surface (tracé vert) et l'étude SEMALY de 1990 sans suite (en marron).
Dans ce schéma, l'actuel T3 irait jusqu'à Gorge de loup tandis que les missions de l'Ouest Lyonnais rejoindraient la Part-Dieu, avec une gare souterraine à 4 voies et 2 tiroirs d'arrière-gare. Les 3 branches Ouest seraient cadencées au quart d'heure, tout comme la branche Est (Meyzieu), avec un appoint organisé entre La Soie et le Stade des Lumières. Ainsi, la Part-Dieu et Gorge de loup bénéficierait de 24 circulations / heure / sens et, sur l'actuel T3, l'exploitation avec des convois de 130 m toutes les 5 minutes procurerait une capacité de l'ordre de 10 000 places / heure / sens, soit 3 fois plus qu'aujourd'hui. La liaison aéroportuaire Rhônexpress pourrait aussi emprunter ce tunnel.
Lyon - Rue Maurice Flandin - 5 octobre 2013 - L'exploitation de T3 par des rames de 43 m ne suffit pas face au développement de l'urbanisation dans l'Est Lyonnais. Dans notre réflexion, le tunnel émergerait à l'arrière-plan du cliché, après le carrefour de l'avenue Félix Faure. © transporturbain
Si on prend en référence une estimation actualisée à 1,5 MM€ pour le projet de métro E entre Bellecour et Alaï et un tunnel à réaliser plus court de 2 km, il n'y a guère de risque de dépasser ce montant à réaliser EOLE et les 3 lignes de tramway du plateau Ouest pour la desserte du 5ème arrondissement... d'autant qu'il faudrait réviser la comparaison en intégrant le coût du scénario métro amorcé à la Part-Dieu dont il commence à être question.
Tassin - 6 septembre 2019 - L'Ouest Lyonnais sortira-t-il de l'ombre pour entrer dans la lumière... grâce à un tunnel sous le centre de Lyon ? © transportrail
Mais ce scénario a un premier point faible : il suppose soit un accord avec la Région, soit une extension de la Métropole puisque l'Ouest Lyonnais sort de ses actuelles limites. Et il est peut-être un peu trop pragmatique par rapport à un métro qui surfe sur l'apparente simplicité d'une recette miraculeuse... pas vraiment à la hauteur des enjeux métropolitains.