Espagne : des tramways essaient de sortir de l’ombre
A Vélez-Málaga comme à Jaén, des tramways dorment sans usage depuis au moins 11 ans. Il semblerait que les autorités municipales se décident à (re-)mettre en service les deux lignes concernées.
Achevée en 2006, la courte ligne de 6,1 km de Vélez-Málaga, desservant 9 stations, n’a été exploitée que pendant 6 ans : elle a été « suspendue » en juin 2012. Pourtant, une extension de 1,2 km a également été construite, mais n’a jamais vu passer un tramway. Durant cette période, pour amortir les pertes, dépassant le million d’euros annuels, 2 rames Urbos ont été louées à Sydney. A l’origine de cette suspension, le refus du gouvernement d’Andalousie de participer au déficit d’exploitation de la ligne, du fait des difficultés des collectivités locales… et un trafic inférieur, au mieux, d’un tiers aux prévisions initiales.
A Jaén, la ligne de 4,7 km a été achevée en 2011 mais n’a vu circuler de tramways (5 Citadis 302) que durant 15 jours, et encore, pour essais ! En cause, un conflit quasi permanent entre les élus locaux et provinciaux. La construction de cette ligne a été financée par la province d’Andalousie, la ville se limitant à l’achat des rames. Cependant, la ville voulait rendre gratuit le tramway, suscitant l’opposition de l’exploitant du réseau d’autobus. Suite aux élections municipales de 2013, remportées par un opposant au projet, la ville s’est désistée, après avoir échoué à concéder à une entreprise privée la ligne. Les installations ont été rétrocédées au gouvernement d’Andalousie.
Dans les deux cas, il faudra consacrer une bonne dizaine de millions d’euros pour procéder à la vérification et à la remise en exploitation de ces petites lignes. Pour la ligne de Vélez- Málaga, le gouvernement central a accepté d’intégrer cette remise en service dans les projets du Plan de Relance sur fonds européens. Il est aussi question de vendre les rames Urbos pour acquérir des rames neuves et de plus petite capacité, compensée par une fréquence accrue.
Cependant, dans les deux cas, les difficultés rencontrées par ces projets ne tiennent pas seulement aux effets d’un manque de sérieux dans la conduite des projets (pas d’étude de potentiel à Jaén par exemple), aux effets de la crise économique de 2008-2012 et aux bisbilles politiques, mais aussi à une chalandise potentiellement assez limitée qui limite l’intérêt du tramway. Il faudra donc non seulement des moyens budgétaires pour relancer ces tramways en 2024 comme annoncé, mais aussi organiser des plans de circulation et d’aménagement urbain valorisant ces infrastructures.
Tarragone réenvisage le tram-train
Agglomération de 325 000 habitants au sud de Barcelone, Tarragone s'est en partie retrouvée à l'écart des dessertes Grandes Lignes en Espagne, puisqu’une section nouvelle contourne la ville avec une gare à Camp de Tarragona à l’est de la bifurcation entre la ligne à grande vitesse Madrid – Barcelone et la ligne rapide vers Valence. Tarragone est desservie par les services régionaux de Barcelone à destination de Reus via Vilaseca d'une part, et vers Tortosa via Salou d'autre part. En complément, il y a quelques Renfe Intercity Barcelone - Alicante / Cartagène s'ajoutant aux Euromed passant par Camp de Tarragona, ainsi que quelques trains épars vers Lleida ou Saragosse.
Il y a donc des emprises ferroviaires à réutiliser et à ne pas laisser tomber entre les mains des promoteurs de nouvelles voies routières. L’objectif est donc au contraire d’engager une démarche de relance de l’offre de transports en commun dans une ville avec un tram-train desservant plusieurs localités de l’agglomération. Le projet n’est pas nouveau, initié en 2000, mais a été parmi les victimes de la crise économique de 2008.
Ironie de l’histoire, Tarragone n’a connu le tramway que de façon très éphémère entre 1883 et 1896. On notera aussi l’existence d’un service de trolleybus interurbain de 1952 à 1973 entre Reus et Tarragone, exploité avec Vétra VBRh. Il existait aussi un chemin de fer secondaire entre Reus et Salou jusqu’en 1975
Ainsi, un réseau de 46 km desservant 34 arrêts a été étudié dans un triangle Cambrils – Reus – Tarragone. La section prioritaire entre Cambrils et Vila-seca est évaluée à 150 M€ dans un schéma global à 550 M€, incluant la création d'une nouvelle gare (Estació Central), sur l'axe Barcelone-Valence (alors que Camp de Tarragona est doublement sur Barcelone - Valence et Barcelone - Madrid), mais plus proche de Tarragone et Reus que ne l'est Camp de Tarragona. Il est aussi prévu de desservir l'aéroport, par une antenne.
Début 2020, la section classique à voie unique de Vila-Seca à la centrale nucléaire de Vandellos a été remplacée par une ligne nouvelle, à double voie et double écartement. Le gain de temps et de capacité est intéressant, mais Salou a perdu sa desserte ferroviaire et Cambrils a une nouvelle gare un peu plus excentrée. L'idée de la section jaune du tram-train est de réutiliser l'emprise abandonnée par ADIF, plus de remonter jusqu'à la gare nouvelle de Cambrils.
L'antenne Tarragone - Reus est toujours en service mais devrait disparaître à moyen terme pour laisser place au tram-train (mais pas avant que la gare Estació Central ne soit mise en service).
La section Barcelone - Tarragone à écartement ibérique devrait continuer avec un service des Rodalies de Catalunya jusqu'à Tarragone (il faut bien desservir les villes de la côte à l'Est de Tarragone, ce que ne permet pas la LAV) ainsi que pour la desserte fret du port de Tarragone (premier port d'Espagne pour les hydrocarbures).
Les FGC seront l’exploitant de ce service, amplifiant au passage la diversité des activités de cette entreprise, et l’infrastructure, entièrement remplacée, sera établie à l’écartement de 1435 mm. Il ne sera donc pas possible de circuler sur les lignes ADIF, sauf éventuellement les sections à double écartement... mais avec une complexité de plus liée à l'interface quai-train du fait d'une hauteur d'accès plus basse.
Le métro léger de Malaga en service
Le 30 juillet dernier, le métro léger de Malaga a été mis en service. Il comprend 2 lignes en tronc commun formant un Y. La ligne 1 est longue de 6,7 km dont 3,8 en tunnel et comprend 10 stations. La seconde est plus courte, 4,3 km seulement et reste entièrement souterraine.Le départ des 2 lignes se situe près de la gare et elles rejoignent respectivement le pôle technologie Andalucia Tech et le palais des sports.
Livrée chamarée pour les rames Urbos3 du métro de Malaga, qui a retenu la gamme de tramways du constructeur espagnol CAF, comme à Séville où ce matériel a fait ses preuves sur une exploitation partiellement souterraine. (cliché X)
L'exploitation est assurée avec 14 rames de tramway Urbos3 livrées par CAF et équipées d'un CBTC Urbalis 400 fourni par Alstom, ce qui, en s'affranchissant de la signalisation latérale, permet de resserrer jusqu'à 90 secondes l'intervalle entre les trains. Les stations
Le réseau est concédé par le gouvernement d'Andalousie, à un groupement d'entreprises jusqu'en 2042. L'agence des travaux publics du gouvernement d'Andalousie est toutefois présent à 25% à son capital.